
S'il est une voix française indissociable d'une star étrangère, c'est bien celle de Claude Bertrand sur Roger Moore. Il a doublé l'acteur britannique, à quelques exceptions près, durant toute sa carrière. Même si le timbre naturellement grave du comédien français était plus proche de celui de Bud Spencer, qu'il a souvent doublé aussi, son talent lui permettait d'alléger sa voix et de lui donner un ton plus flegmatique sur Moore. Hélas, la maladie a eu raison de ce gaillard de 1,90 mètre en 1986. Il a laissé Roger Moore orphelin, en quelque sorte, puisque depuis cette date, Moore n'a pas eu de voix française habituelle.
Claude Bertrand a doublé Roger Moore dans
Le Saint (série 1962-1969),
La Seconde Mort d’Harold Pelham (1970),
Amicalement Vôtre (série 1971-1972),
Vivre et Laisser Mourir (1973),
L'Homme au Pistolet d'or (1974),
Gold (1974),
Le Veinard (1975),
L’Exécuteur (1976),
Parole d’Homme (1976),
L'Espion qui m'aimait (1977),
Les Oies sauvages (1978),
Moonraker (1979),
Bons Baisers d’Athènes (1979),
Le Commando de Sa Majesté (1980),
Les Séducteurs (1980),
Les Loups de Haute Mer (1980),
Rien que Pour vos Yeux (1981),
Octopussy (1983),
Machination (1984) et
Dangereusement Vôtre (1985).
Claude Bertrand est né le 24 mars 1919 à Gréasque, dans les Bouches-du-Rhône. Après le Baccalauréat série Lettres et un diplôme supérieur en Physique et Chimie, passionné par le théâtre, il décide de devenir comédien. Il entre alors au Conservatoire national d’art dramatique de Paris et débute, en 1946, en faisant de la figuration au Vieux Colombier. C'est aussi à cette époque qu'il commence à faire du doublage. Il prête sa voix à John Wayne dans
Sacramento (1942),
L'Ange et le mauvais garçon (1947), à Orson Welles dans
La Dame de Shanghaï (1948), Joseph Cotten dans
Le Troisième homme (1949)… En 1949, il se marie à Paris. De cette union va naître, en janvier 1955, son fils René. Hélas, en 1968, son épouse décède dans un accident. Quelques années plus tard, Claude Bertrand se remarie et partage son temps entre sa vie de famille et son métier qui le passionne toujours autant.
A propos de son père, René Bertrand nous dit : « Mon père était un être secret qui parlait peu de lui. C’était par contre un boute-en-train en société où il était apprécié pour ses talents de conteur. Je crois qu’il fut excellent dans le doublage. Quelques comédiens célèbres se prêtèrent à sa voix : Roger Moore, Charles Bronson (notamment dans
Un Justicier dans la ville en 1974) plus que d’autres. Il avait, je crois, renoncé au théâtre pour gagner mieux sa vie. Le doublage, en fin de compte, le lui aura à peine permis. Quelques souvenirs me reviennent des répétitions musicales, à la maison, de la partition de O’Malley, le héros félin du long métrage de Disney
Les Aristochats (1970) à l’occasion desquelles il a alors définitivement arrêté de fumer car c’était un gros fumeur de Gitanes. »
Toujours à propos de doublage, notons que Bertrand a doublé de nombreux autres acteurs : Ray Milland dans
Le Crime était presque parfait (1954), Marlon Brando dans
Sayonara (1957), Brad Dexter dans
Les Sept mercenaires (1960), Eli Wallach dans
Le Bon, la Brute et le Truand (1966), Peter Ustinov dans
Le Fantôme de Barbe-noire (1968), le personnage du Capitaine Haddock dans
Tintin et le temple du soleil (1969) et dans
Tintin et le lac aux requins (1972), William Conrad dans la série
Cannon (à partir de 1973), le personnage de Petit Jean dans le
Robin des Bois de Disney, 1973), Robert Mitchum dans
Le Grand sommeil (1978) et très souvent Burt Lancaster (
Trapèze,
Scorpio…) et Bud Spencer (
On l'appelle Trinita…).
Claude Bertrand est aussi apparu dans quelques films et feuilletons français :
Le Couteau sous la gorge (1955),
Marguerite de la nuit (1956),
Michel Vaillant (1967),
Omer Pacha (1970),
L’Amour l’après-midi (1972),
Les Cinq dernières minutes (1975),
Police Python 357 (1976),
Le Maître d’école (1981)…
En 1979, à l’âge de 60 ans, Claude Bertrand prend sa retraite et part s’installer à Bessèges dans le Gard. De là, il remonte régulièrement à Paris pour le doublage des films de Roger Moore et de Bud Spencer en particulier. En mars 1985, les premiers signes d’une longue maladie apparaissent. Il nous quitte le 13 décembre 1986.

D'autres comédiens ont prêté leur voix à Roger Moore, selon l'époque et les choix des directeurs artistiques :
Jean-Louis Jemma (la voix française de Guy Williams dans la série
Zorro) dans
La Dernière Fois que j'ai vu Paris (1954), dans
Diane de Poitiers (1956) et dans
L'Enlèvement des Sabines (1961) -
Georges Descrières dans
Mélodie interrompue (1955) -
Claude d’Yd dans
Le Voleur du Roi (1955) -
Jacques Toja (la voix de Marlon Brando dan le 1er doublage de
Superman) dans
Ivanhoé (série 1958) -
Marc Cassot (la voix française de Paul Newman) dans
Quand la terre brûle (1959) -
René Arrieu (la voix française habituelle de Henry Fonda) dans
Le Trésor des Sept Collines (1961) et dans
Au péril de sa vie (1961),
Jean Roche dans
Sherlock Holmes à New York (1976) -
Jean-Claude Michel (la voix française habituelle de Sean Connery) dans
Double jeu (Crossplot) (1969) et dans
L'Equipée du Cannonball (1981) -
Patrick Floersheim (la voix française habituelle de Michael Douglas) dans
Le Muppet Show (1980) -
Daniel Gall (la voix française d'Actarus dans
Goldorak) dans
L'héritier de la Panthère rose (1983) - le comédien québécois
Léo Ilial dans
Feu, glace et dynamite (1990),
Claude Giraud (la voix française de Robert Redford) dans
Double Arnaque (1990),
Le Grand Tournoi (1996) et dans
Alias (2002) (série) (saison 1, épisode 16 :
la Prophétie) - le comédien belge
Pascal Racan dans
L'Homme qui refusait de mourir (1994) -
Jean Berger (la voix de Patrick Macnee dans
Chapeau melon et bottes de cuir) dans
Spice World, le film (1997) -
Jean Barney (il a doublé Michael Douglas dans
Wall Street) dans
Le Saint (1997) -
Jean Lagache (il a doublé plusieurs fois Clint Eastwood) dans
Stratégiquement Vôtre (2001) -
Pierre Hatet (la voix française de Mike Connors dans
Mannix et du Doc dans
Retour vers le futur) dans
Boat Trip (2002) -
Frédéric Cerdal (il a doublé Michael Caine dans la trilogie des
Dark Knight) dans
Comme chiens et chats : La Revanche de Kitty Galore (2010 ; Voix de Tab Lazenby) - le comédien belge
Patrick Waleffe dans
Il était une fois à Castlebury (2011) et
Jean-Pierre Leroux (il a parfois doublé Anthony Perkins) dans le téléfilm
Le Saint (2017).
(A la mémoire de Yann Chesnais et de son "Sir Roger Moore Project")
(c) La Gazette du doublage - 2020