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Le Nécrophile (c) Dessins de What's Up Now


Objectif Cinéma
: (Long silence..) Revenons à la deuxième commission. Que s’est-il passé ?

Philippe Barassat : On a passé le film une deuxième fois en commission plénière. J’ai été convoqué à la Brigade des mineurs, un policier est venu m’apporter une convocation pour le lendemain matin. J’ai rencontré le commissaire de la Brigade des mineurs qui m’a expliqué que des associations et des groupes, qui se voulaient anonymes, bien entendu, portaient plainte et s’inquiétaient de mon travail. Il m’a posé des questions sur mes différents films, et surtout sur l’histoire de ce film. Il m’a fait signer une déclaration comme quoi je passerai par la DASS. Lorsqu’on fait des films avec des enfants, on est obligés de passer par la DASS. Donc, on a téléphoné à la DASS, qui nous a expliqué, après nous avoir fait traîner pendant trois mois, que le scénario ne posait pas de problème en soi mais que cela dépendait de l’enfant choisi, et concernait les risques qu’encourt l’enfant en tournant ce film. Ils ont un droit de regard sur l’enfant : est-ce qu’il va être traumatisé ?, est-ce qu’on ne le fait pas trop tourner, etc. Ils ont refusé de prendre position sur le scénario ; nous avons présenté un enfant, et avons été convoqué par les deux responsables de la DASS qui étaient très choqués par le scénario. J’ai défendu mon film. Elles n’ont pas pris de décision et ont déclaré que je devais passer devant une commission où il y aurait des représentants du Ministère du travail, de l’Education nationale, un médecin, une juge du Tribunal pour enfants, et deux représentants du CNC qui, grosso modo, seraient mes avocats.

Parallèlement, je m’étonnais de ce que la subvention du CNC ne soit pas encore tombée. On avait investi beaucoup d’argent, et à chaque fois qu’on leur téléphonait pour avoir des sous, on nous répondait " ah mais le dossier est là ", " il manque tel papier " ou " la poste est en retard ", ça a été comme ça tous les jours. Ils mettent un mois, un mois et demi une fois qu’on a fait la demande. La différence n’était pas énorme, enfin c’était quand même chiant parce qu’on continuait à sortir les sous. On est une toute petite boîte de production et je mettais tous mes sous à l’intérieur, pour financer ce film. On est repassé à la commission; les scènes de nécrophilie et de nécrophagie posaient problème.


Objectif Cinéma : C’est-à-dire, nécrophagie ?

Philippe Barassat : En fait, le vieil homme se débarrasse de ses cadavres en les mettant dans un incinérateur près de l’immeuble. Et un jour, l’incinérateur tombe en panne. Le vieil homme décrète que si la jeune fille s’évanouit si souvent, c’est parce qu’elle ne mange pas assez de viande. Il décide de lui faire des soupes à la viande et il se trouve qu’elles ont un drôle de goût... Voilà, c’est un gag. Ils ont été un peu choqués par ça, ils ont été très clairement choqués par " Le Fisc, c’est rien à côté de la DASS ! " et par la scène finale, où l’enfant se donne au vieux monsieur, pour laquelle j’avais prévu une langue qui fait deux mètres de long, langue qui lèche les tétons de la jeune fille, comme un petit chien qui nous lèche dans les bras. Comme dans cette scène, le vieux monsieur est nu, moi, je fais très attention à la manière dont j’utilise les enfants. Je ne parle que de cul dans mes histoires, et c’est la dernière chose dont il est fondamentalement question. Ce qui m’intéresse, ce sont les sentiments des personnages entre eux, les émotions qu’ils traversent. Et il est hors de question de parler de sexe avec les enfants, d’abord parce que ce n’est pas le sujet du film, et ensuite parce que les parents font l’éducation de l’enfant et ce n’est certainement pas à moi, réalisateur, d’intervenir là-dedans. L’idée de présenter à la petite fille devant elle, l’acteur nu, était une chose qui, moi, me choquait. Donc j’ai choisi d’avoir une doublure à ce moment-là, la petite fille pouvait rester avec les parents, si elle le voulait et la scène se tournerait. Ils ont soupçonné que j’allais me servir de la doublure corps pour commettre des abominations, et ont dit que cela pouvait être traumatisant pour la petite fille, lorsqu’elle verrait le film terminé, de voir ce que l’on faisait avec l’image de son corps. Mais je ne sais pas ce qu’ils ont imaginé.




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