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  Haute Tension (c) D.R.

Les références qui jalonnent le film sont nombreuses. Du coq à l’âne, Aja passe en revue différentes époques du cinéma horrifique conciliant Massacre à la tronçonneuse (le tueur qui, à la fin, tel un Leatherface, court avec sa tronçonneuse sur une route quasi-déserte) ; « sur-moi Shyamalan » (les champs à la Signes et le coup de théâtre à la Sixième Sens) ; Jeepers Creepers (les deux amies qui se lancent des insultes dans la voiture comme le frère et la sœur au début du film de Victor Salva ; le monstre qui roule aussi dans cette camionnette sordide et qui entretient des rapports sexuellement troubles avec ses victimes) ; Blue Velvet (lorsque Marie se cache dans le placard) ; Maniac et consorts…

Aja soigne sa musique en livrant une sélection éclectique qui varie de Muse à Ricci é Poverti en passant par Didier Barbelivien en un coup de couteau magique. La mise en scène, alerte et inspirée, possède une énergie communicative et l’interprétation d’ensemble a su donner le meilleur d’elle-même : Maïwenn n’a jamais été aussi réjouissante que dans ce rôle de Scream-Queen ; Philippe Nahon n’a jamais été plus crapuleux que dans ce rôle de tueur dégueu qui fait « de drôles de choses » avec les têtes découpées de ces victimes. Quant à Cécile de France, elle est absolument remarquable. Son personnage, d’une ambiguïté totale (morale, sexuelle…), est un bel écho à un film lui-même bancal et incertain.

Haute Tension (c) D.R.

C’est à la mode, de nos jours, de concocter des fins volontairement décevantes qui triturent la logique d’une narration policée. En France, l’un des premiers films qui s’est amusé à manipuler le spectateur était Une Affaire privée, le sublime polar de Guillaume Nicloux dans lequel le cinéaste tordait le cou aux faux-semblants et surprenait avec un dénouement inattendu. En filigrane, cela permettait de donner une épaisseur supplémentaire au personnage du détective privé (Thierry Lhermitte) qui, tellement taraudé par ses propres meurtrissures (ses échecs amoureux, sa femme…) ne s’est même pas rendu compte que l’évidence était sous ses yeux. Depuis, on a eu Tristan, une fausse-enquête sympathique qui transformait un polar morbide en hymne à l’amour, ou même l’excellent Swimming Pool, deux films qui procédaient de la même façon. Seulement, si cela passait très bien chez François Ozon, il en est hélas tout autre pour Haute Tension.

Dans Swimming Pool, par exemple, le dénouement remettait en question tout ce que nous venions de voir pour conférer une signification particulière au récit et déboucher sur une subtile réflexion sur les affres de la création. Dans le film d’Aja, cette pirouette ne suscite pas la fascination, mais provoque au contraire un effet perversement inverse. Comme si le réalisateur avait eu peur de la substance de son film, d’être critiqué pour ses trop nombreux emprunts. Il a jugé bon d’ajouter un twist faussement spectaculaire à la manière d’un Shyamalan, mais il ne pouvait pas faire pire. À défaut de rendre son histoire plus captivante, il la décrédibilise et la fait ainsi sombrer dans le grotesque absolu.

  Haute Tension (c) D.R.

Et c’est dommage, tant Haute Tension représentait l’aubaine tant espérée de l’ouverture du cinéma français au film d’horreur. Trop impersonnel, il nous aura donc beaucoup secoués mais sans tenir le rythme jusqu’au bout. De plus, avec ses ambitions si bien affichées («on va faire un film d’horreur français bien gore qui restera comme une éternelle référence»), on se met également à douter de cette virtuosité ostentatoire et à se demander quel est ici l’intérêt d’Aja : réaliser honnêtement un film bien trash pour le plaisir des mirettes ou voir son nom cité comme celui - le seul - qui a réussi à faire le seul bon film gore français ? Mystère. Alors Haute Tension, film sincère ou précipité opportuniste ? Malgré la jubilation procurée par le film, on est en droit d’hésiter. Et plus les jours passent, plus le doute grandit…



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Titre : Haute tension
Réalisateur : Alexandre Aja
Scénariste : Alexandre Aja, Grégory Levasseur
Acteurs : Cécile de France, Maïwenn Le Besco, Philippe Nahon, Frank Khalfoun, Andreï Finti
Producteurs : Alexandre Arcady, Robert Benmussa
Production : EuropaCorp
Distribution : EuropaCorp Distribution
Compositeur : François Eudes
Directeur de la photographie : Maxime Alexandre
Ingénieur du son : Pierre André
Directeur artistique : Grégory Levasseur
Mixage : Didier Lozahic
Monteur son : Emmanuel Augeard
Date de sortie : 18 juin 2003
Interdit aux moins de : 16 ans
Pays : France
Année : 2002
Durée : 1h 35mn