 |
|
|
|
Comme
dans tout scénario hollywoodien qui se respecte (et
qui respecte le porte-monnaie des producteurs), l'histoire
de la vache de David se conclut sur un happy end et un retournement
de situation inattendus, évitant à sa sculpture
de moisir ad vitam aeternam dans les chambres froides de l'oubli
et de l'anonymat. En effet, recluse depuis le bannissement
prononcé par les officiels new-yorkais dans l'ombre
d'un entrepôt du Connecticut, la Lynch Cow est
depuis le 5 septembre 2000 dans la lumière des projecteurs
de la Manhattan Alleged Gallery, où elle demeurera
exposée avant d'être mise aux enchères
au profit d'une association caritative
(16) (selon d'ailleurs le même
principe que le reste du troupeau exposé à la
Cow Parade). David a accueilli avec satisfaction ce dénouement
à la bovinus ex machina, même s'il aurait
préféré pouvoir bénéficier
d'une exposition publique d'une plus grande ampleur : "
Cela a demandé beaucoup de temps, mais je suis heureux
que les gens aient enfin la chance de voir ce qu'ils avaient
manqué. "(17).
|
 |
|
|
Il y a quelques années, après
Twin Peaks : Fire, Walk With Me, David avait littéralement
sub-mergé de scénarios successifs la com-pagnie
française Ciby 2000, qui n'a d'ailleurs pas survécu
au tournant du millénaire. On lui demandait à
chaque fois de revoir sa copie, ce qu'il faisait consciencieusement
en fournissant patiemment une nouvelle version du scénario,
puis deux, sans parvenir toutefois à obtenir leur feu
vert (18).
Au sein de ces projets avortés, et qui reverront peut-être
le jour sous une autre forme plus tard (19),
figurait un scénario de long métrage intitulé
Dream of the Bovine, sorte de slapstick burlesque
à la Marx Brothers. Je ne doute pas que David étonnera
un jour la critique et le public en réalisant une comédie
de ce calibre et en y imprimant sa marque, comme il a déjà
su le faire dans l'hilarant pilote de la série On
the Air. Toujours est-il que ce Dream of the Bovine
est resté lettre morte, bien loin du Cauchemar Bovin
qui n'a pas fini par contre d'alimenter les débats
: la vache de David a perdu son insouciance, les rêves
ne peuplent plus son esprit rongé de cavités
Non, vraiment, la Cow Parade qui défile chaque jour
sur nos écrans télévisés n'a plus
rien de décoratif et de jovial, la fête est terminée.
NOTES
16
: N'ayant pas pu obtenir
la moindre confirmation de cette information, découverte
par hasard, c'est avec la plus extrême prudence que
nous l'avançons : afin de répondre à
des attaques incessantes de la P.E.T.A., la firme
Mac
Donald aurait fait l'acquisition de la sculpture de David
et l'exposerait désormais dans un de ses restaurants,
afin de démontrer qu'elle soutient les actions de la
SPA américaine par rapport aux traitements infligés
aux animaux dans les abattoirs. Information à prendre
avec des pincettes, tant elle paraît tout de même
fantaisiste
17
: " It took some time.
But I'm happy folks got a chance to see what they missed.
"
18
: Hélas,
Francis Bouygues était alors décédé.
Même si l'on pouvait sans doute critiquer son rôle
de bulldozer dans le monde de la télévision,
il fallait malgré tout reconnaître qu'il avait
pour le cinéma une vision qui forçait le respect,
puisque, lorsqu'il avait engagé David, il lui avait
donné carte blanche, le laissant libre de réaliser
ce que bon lui semblait, son propre rôle se limitant
à financer ses créations cinématographiques.
A sa mort, l'équipe dirigeante devint plus réaliste
financièrement et rechigna donc à produire
des films sans avoir un droit de regard sur ceux-ci, même
s'il faut avouer également que David aurait disposé
d'encore moins de liberté de manuvre s'il avait
dû produire Lost Highway dans les circuits habituels
des studios américains, en particulier à propos
du final cut.
19
:
Nous aurons prochainement l'occasion d'évoquer amplement
Mulholland Drive.