QU'EST CE QUE C'EST LE CINEMA ?
" Aujourd'hui, pour tous ceux
qui s'intéressent au cinéma - auteurs, critiques,
distributeurs, musées, publics, etc. - il devient plus
important que jamais de définir le cinéma et
le distinguer des nouveaux médias récemment
arrivés et qui sont en train de transformer l'usage
de l'audiovisuel. La forme classique du cinéma a permis
l'émergence de nouvelles pensées, qui ne sont
accessibles dans aucun autre moyen d'expression artistique,
même plus avancé. Dans ma conférence je
tenterai de définir ce noyau essentiel du cinéma.
Je projetterai les films Adebar, Schwechater et Arnulf Rainer
qui représentent mes tentatives pour atteindre cette
essence du cinéma, bien avant que je ne sois capable
d'en parler. "
Peter Kubelka
ADEBAR
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1956-57 ; 35mm ; 1,37 ; N&B ;
3 min.
Les contours des silhouettes sont secs et durs. Par de nombreux
tirages successifs à haut contraste, Kubelka a obtenu
une image qui se rapproche plus de l'ombre chinoise que de
la photographie. Les détails et les décors sont
ainsi éliminés : les silhouettes se détachent
violemment sur le fond pendant que la phrase musicale, répétée
en boucle, en continu, du début à la fin du
film, crée un effet impressionnant de puissance primitive.
(Stefano Masi)
SCHWECHATER
1957-58 ; 35mm ; 1,37 ; couleur ; 2 min.
Schwechater comporte de nombreux plans d'un seul photogramme.
Aucune image ne dépasse neuf photogrammes. Ce qui est
perçu à la vision du film est une suite clignotante
de fragments de gestes apparentés et de mouvements
syncopés avec différents rythmes de noir et
un rouge en surimpression, accentué par le son. Kubelka
a créé, selon lui, grâce au montage l'image
structurale d'un feu et d'un ruisseau qui coule sans avoir
recours à aucune image de flammes ni d'eau. (P. Adams
Sitney)
ARNULF RAINER
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1958-60 ; 35mm ; 1,37 ; N&B ;
6min.30
Je pense qu'Arnulf Rainer est le film le plus proche de l'essence
du cinéma qui existe parce qu'il emploie les éléments
qui constituent le cinéma dans leur forme la plus radicale
et la plus pure. C'est la lumière et l'absence de lumière,
c'est le son et l'absence de son et leur événement
dans le temps. Ainsi avec Arnulf Rainer : voulant rendre hommage
à l’œuvre de son ami Rainer, après l'avoir filmé
dans son atelier et tenté toutes sortes d'expériences,
Kubelka finit par faire un film sans image du tout (ou plutôt
avec seulement l'horizon, le fondement de toute image), soit
une succession soigneusement structurée de photogrammes
blancs ou noirs, accompagnés ou non de son ; utilisant
ainsi les quatre figures audiovisuelles les plus simples de
l'histoire du cinéma. (Dominique Noguez)