C’est un film,
ou c’est un documentaire ? ".
Cette remarque, entendue cent fois d’amis que nous voulions
emmener voir le cinéma qui nous touche, est assez significative
à l’heure des cases télévisuelles et
des genres étanchement cloisonnés. Il faut donc
rappeler que le documentaire est bien évidemment une
forme d’écriture cinématographique, et qu’il
peut justement être cet espace de création qui
interroge les frontières trop tôt définies
entre fiction, documentaire, film-essai, ou expérimental.
Le lieu où ces limites se brouillent, se confondent,
se travestissent, pour devenir ce pôle nécessaire
où se réinventent des écritures, des
formes toujours en devenir, où s’explorent tous les
possibles du cinéma.
Pour leur 14e édition, les Etats généraux
de Lussas proposent, à travers séminaires et
programmations, une exploration des formes multiples du documentaire
comme expérience du cinéma, et font le pari
que ce voyage nous mènera dans ces continents incertains
et fertiles où différentes manières de
dire s’entremêlent pour sédimenter une poésie
à venir.
PROGRAMME PROVISOIRE (29/05/2002)
Entre-deux
Jean-Louis Comolli et Frédéric
Sabouraud
Si le documentaire se tient
dans l’entre-deux (entre fiction et réel, entre récit
et document, entre cinéma et télévision,
etc.), on trouve ces temps-ci dans quelques films une autre
sorte d’entre-deux, qui affecte à la fois la place
de l’acteur/personnage et celle du spectateur. Côté
acteur/personnage : le film est ce qui lui arrive.
Côté spectateur : dès lors, le film
est moins résolument " ce qui arrive au spectateur "
(Robert Kramer).
La Poétique documentaire,
une autre forme de connaissance
François Niney
" Le réel n’est pas un objet, mais une expérience ",
affirme François
Niney. Il propose de tester la validité cinématographique
de cette maxime en quatre étapes aux noms évocateurs :
" Le Cinéma comme poétique de l’histoire ",
" Le Parti pris des choses ", " Géographies
initiatiques ", et " L’image mouvante,
entre le réel et l’imaginaire, songes et visions ".
L’Expérience des limites
Emeric de Lastens, avec Jean-Claude
Rousseau
On a souvent réduit
le cinéma expérimental à un pur formalisme,
strictement occupé par les potentialités plastiques
du médium au détriment de son usage, notamment
documentaire. En fait, les principaux chantiers théoriques
du cinéma expérimental – le mouvement et sa
décomposition, le recyclage et l'étude visuelle
d'images – questionnent le présupposé idéologique
de l'enregistrement comme "fenêtre ouverte sur le monde",
présupposé qui légitime le documentaire
comme moyen de connaissance et d'empathie. Or les deux démarches
ne sont pas sans passerelles. On le constatera, nombres de
cinéastes expérimentaux, y compris les plus
opposés au " réalisme ontologique",
se sont saisis de la " matière "
documentaire pour l’interroger, et la redéployer.
|