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Paris + William Klein (c) D.R. PARIS + WILLIAM KLEIN
17 avril - 1er septembre 2002
Paris
Par Cécile GIRAUD


FACES

La maison européenne de la photographie nous propose jusqu'au 1er septembre une rétrospective de l’œuvre du photographe William Klein. Moins connus que ses photos, ses films y sont également projetés.



  Qui êtes-vous Polly Magoo ? (c) D.R.

Auteur de deux films sur Mohammed Ali, William Klein n’était pourtant pas un photographe de sport, mais plutôt d’événements culturels ou sociaux (mais les deux vont souvent de pair). Préférant le vif au mort (comprenez le mouvement à la pose ou l’inanimé), bien que quelques-unes de ses photos fassent état d’essais géométriques sous la forme de natures mortes (une bouche d’égout par exemple), mais bien moins fascinantes que le mouvement des foules manifestantes ou des bals de débutantes. L’humain est le mouvement. Et paradoxalement (?), le mouvement est photographique, magnifiquement rendu par les courbes irrégulières que forment la première ligne d’une manifestation ou les flous colorés des robes des défilés. La photo de William Klein ne semble pas exister sans mouvement, et c’est sans doute sa particularité. Ce qui est animé est rendu net, mais la pose statique des jeunes filles deviendra étrangement floue, leur rendant un aspect aérien qu’elles peuvent prendre lors du tournoiement de la valse.

Ainsi, William Klein photographie tout événement, sans se soucier des classes sociales dans lesquelles il se fond, mais faisant mine de les rassembler. Pourtant, tout cela n’est pas indifférent, et un étrange montage nous attend dans la première salle d’exposition. Une grande partie des photos exposées sont montées les unes aux autres par couples : l’une à l’envers, l’une à l’endroit, et forment alors un ensemble coloré aux limites de l’abstraction. On peut alors divaguer sur les raisons de ces associations, qui paraissent tantôt pertinentes, tantôt mystérieuses.

Qui êtes-vous Polly Magoo ? (c) D.R.

Les opposés sont donc au centre de l’œuvre du photographe comme de celle du cinéaste. Ou plutôt l’endroit et l’envers du décor, comme en témoigne le film Qui êtes vous Polly Magoo, qui traite à la fois de la mode, de la télé, bref, des médias exhibitionnistes. Une étrange complémentarité se révèle, d’abord entre les photos, mais également entre l’œuvre photographique et l’œuvre filmique. Car si la photo est mouvement, les images cinématographiques de William Klein semblent bizarrement inanimées.

Une émission de télévision baptisée " Qui êtes vous… ", dirigée par un Jean Rochefort comme vous ne l’avez jamais vu, tente de faire le portrait d’un mannequin en vogue : Polly Magoo. Nous suivons donc Polly dans les défilés, chez elle, un petit studio qui pourrait être celui d’une étudiante. A la couleur des photos viennent s’opposer le noir et le blanc. Mais loin de vouloir estomper les traits par le gris, William Klein appuie, joue du noir et blanc en grimant Polly à outrance : ses cheveux (en fait une perruque) contrastent avec sa peau blanchie qui semble renvoyer la lumière jusqu’à la surexposition. Le visage de Polly est comme dessiné au pochoir, animé par des yeux charbonneux, semblables aux ailes d’un corbeau. Immuable, son visage est le même dans les défilés ou dans la rue. Ce n’est qu’en la suivant hors du tournage que le réalisateur amoureux ne nous permettra de découvrir une Polly à l’endroit, comme si nous passions du négatif au positif : cheveux blonds et yeux clairs, elle est presque méconnaissable. Ainsi, Klein nous donne à voir les deux faces de Polly sans jamais nous donner la transition. Nous passons de l’une à l’autre brutalement, comme un musée nous fait passer d’une photo à l’autre, comme le photomontage de l’exposition nous propose un négatif et un positif possibles.