Chaque film est un " tableau
" énigmatique et animé, une zone zéro,
faussement désordonnée reprenant à son
compte l’espace d’un récit. Reconverti en explorateur
du subjectif poétique, le spectateur renoue avec le
doute et le questionnement perpétuel pour se livrer
à l’expérience de la déstabilisation
et accomplir un voyage sensible. Il confond ses certitudes
et ses convictions pour admettre que le réel est affaire
de moments, de mouvements, et d’émotions. Il s’agit
d’un irrépressible besoin de passer de l’âme
à " l’œuvre ", d’accomplir le salto mortale
qui, à mieux dire, est un salto vitale, un bond libérateur.
" On va au cinématographe, écrit Biély
dès 1907, quand l’âme est couverte de bleus.
C’est la consolation des grands pathétiques de la vie."
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CENDRES
(Film / 16 mm / 29 min / 2001)
Un film sans acteur mais avec de grands hommes (Andréï
Biély / Fiodor Dostoïevski / Johannes Hus) où
le fil tranchant des cendres de Johannes Hus entrechoquent
les " plans fixes sur les fantômes " de Dornach,
Bâle, Constance et les blocs d’images organiques consumées,
visant ainsi à s’opposer aux mouvements révoltés
et lyriques de l’âme réduite à deux dimensions.
" L’homme s’est pélliculisé… "
" […] et elle a brûlé mon corps ; et mon
corps s’est embrasé ; il est devenu la brillante torche
des passions les plus viles ; et puis – il s’est consumé
; à l’endroit où l’homme avait vécu,
il n’est resté qu’une pincée de cendres froides
; le vent a soufflé : la cendre s’est envolée,
s’est dispersée dans l’air. L’homme n’est plus. "
Andréï Biély, Carnets d’un toqué
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S.PATHÉTIQUE
(Vidéo / 26 min / 2000)
" Pathétique (adj.) : Qui provoque chez le spectateur
une émotion forte, un sentiment violent ou passionné,
le mettant en " symphonie " avec l’auteur ou les
personnages. "
" La nuit, tout le monde dormait. Pauvres et riches.
Intelligents et sots. Tous dormaient. Certains dormaient recroquevillés.
D’autres la bouche ouverte. Certains paraissaient morts. Tous
dormaient. Déjà le jour blanc cognait furieusement
aux carreaux. C’était comme un appel aux épuisés.
Pour qu’ils se remettent à jouer une vaine comédie.
" Andreï Biely, Symphonie Dramatique
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KT/4
(Vidéo / 19 min / 1999)
Epreuve d'un travail de peintre (Karen Tual) où je
cherche à fixer non le sujet, mais seulement le point
d’émergence du sujet, ce point qui sans le moindre
arbitraire a été posé comme fondement
du sujet, le spectateur ne verra défiler que les "
moyens inadéquats " : fragments, allusions, efforts,
recherches.
"L'enfant tout à coup aperçoit qu'il n'y a plus
de but, que ses circuits errants et sa quête d'un but
ne lui serviront de rien, que c'est tout au plus l'infini
lui-même qui peut-être le but. L'enfant ne le
pense pas, seulement elle répond par son action à
la question jamais posée, elle se précipite
dans l'étrangeté, elle se réfugie sur
la route, elle s'enfuit le long de la route infinie qui s'allonge,
elle perd la tête et elle n'est même pas capable
de pleurer dans sa course éperdue, qui est comme une
station entre les murailles immobiles de brume." Hermann Broch,
Les somnambules