A LA VIE
A LA MORT
Objectif Cinéma : Pourquoi
le film est-il amputé quatre fois ?
Goutte d'Or Distribution et François
Sichier : Il faut savoir que
ce n'est pas une censure française mais une censure
qui s'exerce dans le pays d'origine de la réalisatrice,
le Liban. Elle a reçu des menaces de mort et la question
était de savoir s'il fallait modifier les dialogues
du film afin d'éviter la censure ou bien de " biper "
les parties discutées par les intégristes
musulmans et la sûreté libanaise, organe du
pouvoir en place. Nous avons choisi de biper nous même.
Il faut savoir que ces gens avaient exigés quarante
sept minutes de coupe. La sûreté libanaise
refuse la diffusion du film sous sa forme actuelle, elle
voudrait une forme édulcorée et aseptisée
des parties incriminées. Il faudrait reformer l'équipe,
convoquer les acteurs et leur demander de rejouer mais différemment
cette fois ci. Il y a dix huit communautés au Liban
et tout ce qui pourrait un tant soit peu exacerber les tensions
identitaires fait l'objet d'une censure de la part de cette
police. Elle trouve sa légitimité de censure
dans cet argument de contrôle de la paix.
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Objectif Cinéma : Si
la cinéaste avait réalisé une comédie
contre l'intolérance, sujet de son film, et non un
film réaliste en prise avec le réel, la censure
aurait peut-être eu du mal à s'exercer ?
Goutte d'Or Distribution et François
Sichier : Elle revendique
son film comme étant une comédie, même
si la guerre est en toile de fond. Nous occidentaux avons
une image déformée de la guerre au Liban.
Ce qu'elle montre est totalement différent de tout
ce que les médias ont pu diffuser. Elle désigne
les cloisonnements entre les gens d'un même immeuble,
vivant chacun sa guerre. Le film s'appelait à l'origine
Les Autres où " ces étrangers "
pakistanais, égyptiens, skrilankais, philippins occupant
des appartements de riches libanais exilés sont tous
dans une situation irrationnelle. Des pantins au milieu
d'une guerre qui ne les concernent que lointainement et
pourtant au cur de leurs vies. Dans toute guerre arrive
ce moment fatal où on a vite le sentiment que les
antagonismes n'ont plus lieux d'être, le combat perdure
sans raisons. C'est une logique absurde que la cinéaste
traduit pertinemment. Elle montre un aspect de la guerre
qui nous échappe totalement. Alors les dialogues
bipés font tâches pour les extrémistes
qui ne supportent pas l'ambiguïté.
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