Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     


 

 

 

 

 
Transit (c) D.R.
Photo tirée du film Transit
PHILIPPE BARASSAT
Réalisateur
Entretien réalisé en mars 2002
Par Gilles LYON-CAEN


Philippe Barassat a réalisé quatre courts métrages : Folle de ce mec (1995), Mon copain Rachid (1998), Transit (1999) et Les Eléphants de la planète Mars (2000). Depuis maintenant plus d’un an, Le Nécrophile, son nouveau projet, apparaît comme la cible de la censure, mais pas de la part du CNC. En vérité, l’objet du délit serait moins la représentation de la nécrophilie (à des fins artistiques), qu’une question périphérique (un problème juridique, en particulier, posant problème) : nous avons tenté de comprendre, à l’aide du cinéaste, un discours et des valeurs morales qui empêchent Le Nécrophile de voir le jour. Au seul nom des droits de l’enfant.


Objectif Cinéma : Peux-tu nous raconter le début de l’histoire ?

Philippe Barassat : En fait, j’avais deux projets : Le Nécrophile et Les Eléphants de la planète Mars. J’ai commencé par Les Eléphants car Canal + est entré dans ce projet ; quand je l’ai terminé, je suis passé à l’autre. Canal + a longtemps hésité, et n’ait jamais entré dedans. J’ai ensuite présenté Le Nécrophile au CNC, qui est passé une première fois en commission, et a été retenu.


  Le Nécrophile (c) Dessins de What's Up Now
Objectif Cinéma : Pour restituer le film, quelle est son histoire ?

Philippe Barassat : C’est un homme sans âge, ou un très vieux monsieur, solitaire, le genre de personnes qui vivent à Paris et qui ne sortent jamais de chez eux. Il baragouine, on ne comprend pas grand chose à ce qu’il dit. Il est assez vilain, c’est une sorte de Nosferatu enfermé dans son appartement et qui ne communique avec personne. Sa seule joie, c’est de sortir la nuit : la nuit, il va dans les cimetières, il en tire les cadavres, les ramène chez lui et les adore. Il vit une grande histoire d’amour avec les mortes qu’il déterre. Lorsque le film commence, les flics sonnent à sa porte, débarquent chez lui, à Carpentras. Ils viennent le voir car il est l’unique membre de la famille, dans l’arbre généalogique, pouvant s’occuper d’une petite fille de la DASS, qui en a ras-le-bol d’elle, lui étant son cousin éloigné. Il est menacé de poursuite de la part du Fisc, s’il refuse de s’en occuper. A un moment, la directrice de la DASS dit au vieux monsieur : " Le Fisc, c’est rien à côté de la DASS ! " Pour continuer de vaquer à ses occupations nocturnes, il accepte et la prend en charge. La petite fille trouve l’ambiance glauque, sinistre : elle essaye de s’enfuir, va à la police, qui la renvoie chez elle car elle a un tuteur légal. Et elle découvre ce que fait le vieux monsieur la nuit. Elle aperçoit l’amour qu’il fait avec les mortes. Cela la touche, elle voit derrière son apparence de Nosferatu, un vieil homme d’une infinie tendresse et d’un amour démesuré. Elle commence à avoir moins peur, s’habitue à sa présence, et éprouve du plaisir à être avec lui. Dans la cour de l’immeuble, elle se fait draguer par un petit garçon de son âge, qui tente de l’embrasser. Elle découvre qu’elle s’amuse plus avec le vieux qu’avec le petit garçon. Celui-ci, amoureux d’elle et extrêmement jaloux, épie le vieux monsieur qu’il déteste : il découvre ce qu’il fait et le dénonce au voisinage. Les voisins veulent le lyncher et une manifestation a lieu contre lui, dans la cour de l’immeuble. Le vieil homme souffre abominablement du manque de ces mortes. Et la petite fille qui, en quelque sorte, est tombée amoureuse de lui, et reste à ses côtés, comprend sa souffrance et lui propose de faire la morte pour lui. Elle se couche nue sur la table des mortes afin qu’il souffre moins de ce manque, mais aussi dans l’espoir d’un amour qu’elle désire tant, car elle est seule, abandonnée. Il s’apprête à lui donner cet amour lorsqu’il aperçoit une petite veine qui bat : elle est donc vivante... et ce n’est pas son fantasme. Lui ne peut pas, et elle est très déçue car elle n’a pas l’étreinte qu’elle désirait. Et ils décident de faire contre mauvaise fortune bon coeur, ce qui est le complément du titre du film. Elle n’a plus peur de lui, et même s’il n’arrive pas à faire l’amour, c’est pas grave, la tendresse est passée et ils sont devenus les meilleurs amis du monde. Le film se termine : ils partent dans la nuit ensemble, le petit garçon les aperçoit dans un cimetière. Ils vont partir probablement à l’autre bout du monde. Ils s’éloignent, les tombes s’ouvrent, les morts sortent et les accompagnent en dansant.