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Une pure coïncidence (c) D.R. ROMAIN GOUPIL
Réalisateur
Entretien réalisé le 19 Mai 2002
à Cannes par Clémentine GALLOT
de l’équipe de Cinélycée.com


Entretien express avec le réalisateur militant Romain Goupil, juré pour la Caméra d’or, mais aussi en sélection avec Une pure coïncidence à la Quinzaine des réalisateurs.

Cinélycée : Comment est l’ambiance à Cannes, cette année ?

Romain Goupil : Elle est beaucoup plus sobre que d’habitude, il y a moins de paillettes, plus d’intérêt pour les films, plus de discussion. Comme si le fait d’être dans une ville où le vote d’extrême droite est important poussait les gens à prendre leur travail au sérieux. Cela rend Cannes extrêmement agréable, beaucoup moins superficielle que les années précédentes. Mais en même temps, bien sûr, il y a les fêtes qui permettent de s’amuser, de décompresser, de rencontrer des gens, avec des excès publicitaires, mais ce n’est pas très grave.


  Une pure coïncidence (c) D.R.

Cinélycée : Comment voyez-vous le cinéma américain par rapport au cinéma français ?

Romain Goupil : Je suis loin d’avoir une pensée générale sur le cinéma américain, je ne fonctionne pas de cette manière. Que le film soit américain, belge ou français, je n’ai aucune préférence nationale. Il peut s’agir d’un film commercial, formaté, pour distraire le public : c’est la machine industrielle qui veut ça, il y en a de bons et de moins bons, suivant le talent des réalisateurs. Mes préférés sont les films qui m’aident à comprendre mon rapport au monde, ou celui d’autres cinéastes. D'ailleurs, ce sont souvent des films qui viennent de pays où il est difficile de s’exprimer, des films peut-être plus justes par rapport à la situation des créateurs. Mais ce n’est pas parce qu’un film est iranien ou autre qu’il est bon.


Cinélycée : Quels sont vos projets ?

Romain Goupil : Mes projets sont liés à la façon dont je peux intervenir sur ce qui se passe aujourd’hui. Je ne sais pas encore comment cela va se mélanger au scénario: vu ma façon de tourner et d’avancer, c’est toujours un mélange de choses passées et de préoccupations contemporaines. Je vais voir autour de quel sujet je tournerai mon prochain long métrage.


Mourir à 30 ans (c) D.R.

Cinélycée : Comment arrivez-vous à concilier activité militante et artistique ?

Romain Goupil : Je ne concilie rien du tout! Mon rapport au monde est tel que je fonctionne par rapport aux injustices, à ce qui est intolérable. Et cela de manière militante, comme cela a été le cas dans mes années lycéennes de 68, dans une organisation révolutionnaire. J’en ai fait la critique, mais cela ne m’empêche pas de considérer qu’il faut changer les choses: ainsi j’interviens comme individu, comme citoyen. En revanche, je ne me sers pas de mes films comme d’une arme quelconque pour mobiliser. Je suis très loin de l’idée d’un film à message, qui apporterait une solution, ou entraînerait une mobilisation. Je suis en faveur des films qui montrent une contradiction ou qui suscitent en un questionnement. Quant à une éventuelle solution (que déjà je ne détiens pas en tant qu’individu) elle ne pourrait en aucun cas être le propos de mes films, ni illustrer un discours pour convaincre les gens de quelque chose de juste.

En tant qu’homme, dans des situations d’urgence comme la Bosnie, l’Algérie, ou la Tchétchénie, je mets à profit mon accès aux médias, j’écris et j’interviens pour essayer de mobiliser les gens, afin de résister à une situation d’oppression ou d’injustice. De même, en France, quand j’apprends que le FN, parti xénophobe, raciste, est au deuxième tour, j’essaye de tout faire, avec tous les moyens qui ne sont pas ceux du cinéma, pour faire réagir les gens.