Dominique Noguez est un
passeur : il n’a eu cesse depuis les années 60 d’initier
le public français au cinéma dit expérimental,
aussi bien par ses cours sauvages à la Sorbonne que
ses nombreuses publications - Essai sur le cinéma Québécois,
Le Cinéma Autrement, Le Cinéma " underground "
américain, Trente ans de cinéma expérimental
en France etc... Ce livre est une seconde réédition,
augmentée et refondue avec le poids de vingt ans, le
temps d’une génération adepte de la vidéo
et de l’internet où le " cinéma pur "
peut encore s’incarner. Outre ses remarquables qualités
intellectuelles - rigueur de la pensée, connaissance
fine de son champ d’analyse - l’auteur est aussi un séducteur
rusé maniant la langue et son lecteur avec une belle
dextérité dans l’art de charmer. L’éloge
est tant pour ce cinéma, véritable corps amoureux
sans cesse ausculté, trituré et caressé,
que pour nous spectateurs violemment appelés à
découvrir tout ce cinéma. Il est pur, total,
contre le pouvoir, anarchique, sensuel, poétique, intégral,
individuel, marginal, jeune, indépendant, maudit, clandestin,
essentiel, abstrait, rythmique, art, privé, parallèle,
underground, créatif, visionnaire, non hollywoodien,
militant, autre, avant-garde. EXPERIMENTAL.
Qu’il soit de Kubelka, Lumières, Welles, Dulac, Cocteau,
Brakhage, Courant, Debord, McLaren, Warhol, Godard, Vertov,
Straub, Hains, Matsumoto, Garrel, Mekas. Le vertige provient
de cette longue énumération que je pourrai dire
encore et encore, dans un mouvement de désir insatiable
car tous peuvent trouver sa part d’innocence et de jouissance
au sein de ce cinéma du plaisir, où le fil rouge
reliant tous ces auteurs serait la jouissance des formes,
la visibilité charnelle du travail des sens. Alors
cela justifie impeccablement ce signe graphique surexposé,
matière dure et intransigeante barrant systématiquement
ce mot bâtard: EXPERIMENTAL
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