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Romy au fil de la vie (c) D.R. LIVRE

Romy au fil de la vie
de David Lelait
Par Richard DALLA ROSA


Rédiger une biographie n’est pas chose aisée, d’autant plus quand il ne s’agit pas de la sienne. Ecrire pour un autre, pour la mémoire d’un autre, relève d’une gageure morale et humaine : entre le souci de la chronologie, de l’authenticité des souvenirs et l’éventuel parti pris qui s’offre au rédacteur, le pas est vite franchi. David Lelait a su s’en garder, car cet autre, c’est Romy Schneider.

  Romy Schneider (c) D.R.
Dans l’écriture, le centre d’intérêt, hormis le plaisir de l’imagination et le travail du style, c’est la narratalogie, à savoir le point de vue du ou des narrateur(s). Si l’on s’aventurait à comparer deux biographies de Romy Schneider parmi tant d’autres, on verrait que dans l’une, la parole est laissée à l’actrice, alors que dans l’autre, on lui impose des pensées qu’elle n’a peut-être pas eues, en un mot, on suppute. Cette autre biographie s’intitule tout simplement " Romy ", rédigée par Catherine Hermary-Vieille. Connue pour ses premiers romans bardés de prix littéraires, elle a voulu faire revivre la figure de Romy Schneider au corps défendant et absent de celle-ci. Pourvu de qualités évidentes, son texte présente néanmoins des digressions romanesques tendant à l’affabulation emphatique, qui fait de la vie de Romy une fable obscure, dure, violente. Pire qu’une fable de cet acabit, un film noir.

Or, la vie de Romy Schneider a été et restera une vie, pas autre chose. Une vie composée de films, de pièces de théâtre aussi, de joies et de peines, de jours et de nuits, de rencontres et de ruptures. C’est ce qu’a respecté David Lelait : l’exactitude et l’humilité du biographe. Le lyrisme, s’il y en est dans ce genre, peut servir le récit mais n’a pas à fausser son propos. Laissons à Romy ce qui lui appartient. Chaque vie est un mystère, et le but du biographe est de fleurir ce mystère, non de l’extrapoler. La parole est donc à la " personne racontée ", ici : par exemple, astucieuse est l’idée de mettre en exergue de chaque chapitre une parole de Romy Schneider, au lieu de lui prêter, au fil de la narration chez Hermary-Vieille, des monologues intérieurs parfois trop personnalisés.

Max Reinhardt (c) D.R.
David Lelait, lui, sait s’effacer au profit de son propos. Ainsi la construction de son texte a le tact et la sincérité que l’actrice aurait aimé voir régner dans les relations humaines. Il y a de la vérité simple et nue aussi : le premier chapitre porte en exergue un conseil de Max Reinhardt aux comédiens : " Surtout gardez votre enfance, mettez-la dans votre poche avec votre mouchoir par-dessus et emportez-la toujours avec vous ". La vie de Romy Schneider, comme toutes les autres d’ailleurs, se résume en ce " Rosebud ", ce mot de passe pour l’éternité d’une existence ici-bas. L’enfance, telle une pierre angulaire où se raccrocher, où s’écorcher, vif ou vive. L’enfance et l’adolescence surtout, qu’elle n’a pas vraiment vécu à cause de Sissi, dont elle portera l’ombre de la malédiction toute sa vie, malgré l’écoulement des jours au quotidien qui est censé modérer, pondérer les vagues de fond qui peuvent noyer l’âme en elle-même. Peut-être ne voulait-elle pas donner crédit à ce semblant de malédiction, car la vie n’en est pas une. Ce que vous font les autres peut en relever, mais libre à chacun de contrer les mauvais sorts.

L’actrice aura lutté et contré éperdument, jusqu’à la perdition finale, celle de son fils et de sa propre image. Le cinéma lui aura volé l’image de sa vie à défaut de lui en rendre une vivable, viable. Mais comment la fiction peut-elle rendre à la réalité ce qu’elle lui a volé ? Et surtout comment rendre ce qu’elle ne lui a pas pris ? La sobriété stylistique de David Lelait donne le ton face aux fulgurances qui dessinaient le destin de Romy Schneider, une sobriété qui donne tout son éclat à la force vitale de l’actrice, force allant de la générosité la plus avenante aux colères les plus farouches. Et c’est étrange comme une autre figure résonne avec l’absente du 29 mai 1982 : Patrick Dewaere, disparu le 16 juillet de la même année. Une figure analogue, déclinée au masculin, filant parallèle vers le même exutoire. Vingt ans sans eux, et avec eux pourtant. Leur image aura été aussi forte que leur personne, et cette adéquation peut aussi bien en apprendre beaucoup à la nouvelle génération d’acteurs que forcer l’admiration de chacun. Le message est radicalement lucide : respecter la valeur intrinsèque de la vie, parfois perdue entre fictions, fantasmes et réalités.




Titre
 : Romy au fil de la vie
Auteur : David Lelait
Editeur : Editions Payot
Collection : Documents Payot
Illustrations : couleur

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