SYNOPSIS :
Mardar, qui mène une existence morne de coursier rencontre la
jeune Moudan. Le père de l’adolescente, un riche homme d’affaires,
le charge de la promener dans les rues de Shanghaï. Moudan va
séduire Mardar. Ils vont s’aimer. Mais Mardar est lié à une
bande de malfrats qui projettent de prendre en otage Moudan
afin de racketter son père... |
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AU
FIL DES FLUIDES
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Une voix off d’un homme,
caméra au poing, sur la rivière Suzhou charriant l’humaine
humanité. Dès les premières images du film, le principe s’énonce :
la caméra ne montrera que l’arbitraire du monde, parcellisé
et retravaillé à l’aune du désir de vie (de flux) du narrateur.
L’oscillation de la barque, enivrante et délétère, fonctionnera
comme leitmotiv formel du récit. Oscillation entre le monde
à saisir dans son cadre (la rue, les toits des maisons, la
fluidité des corps à pieds, en vélo, en tramway) et la sourde
nécessité de trouver sa proie, la femme ? Du fantasme
de la femme que l’on aime dans le regard désirant d’un autre,
Lou Yee construit une mécanique réglée au hasard (contrôlé)
de la rencontre. Il semble nous inviter à l’élaboration de
son film, requérant notre regard afin de l’aider à choisir
celle qui s’incarnera dans une légende d’amour. Ainsi, la
femme comme ébranlement du monde, celle par qui l’homme sans
cesse ne cessera de filmer pour la capter et par là-même accéder
au monde. Alors que Chantal Akerman impose un monde traversé
de fureur dans son film splendide La Captive, Lou Yee
plus intellectuellement (sa limite) délimite un pré-carré
parfois laborieux de mise en abyme du fantasme de la femme.
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Tout est double au pays
de Lou Yee, le récit a besoin d’une autre histoire pour tenir
debout, le narrateur a besoin des autres pour se dire vivant.
La vampirisation vocale aspire et extirpe du flot quotidien
deux être Moudain et Mardar, deux anonymes furtivement perçus
dans les rues de Shangaï. Tout deux ont la charge écrasante
d’incarner un amour impossible, mis en exergue du film (une
femme raconte à un homme comme un défi la folle histoire d’amour
de Mardar poursuivant à travers le monde sa bien aimée). Ce
qui freine l’adhésion sensible au postulat ainsi énoncé est
le procès insinueux que semble vouloir faire subir à l’imaginaire
le « réel » du narrateur. Comme si la fiction, les
personnages avaient à rendre compte d’une quelconque solution
du monde soluble dans un temps réglementaire. Le film semble
peiner parfois à concilier ces deux mondes à l’intérieur même
de son cadre, Moudan et Mardar nous invitent plus au monde
que les préoccupations un tantinet sentencieuses du narrateur
et de sa femme Meimei, envers sexy de Moudan l’amante fidèle.
Il y a dans le film comme un combat entre ce qui serait des
hommes (le contingent, la réalité des sentiments, le cinéma)
et les femmes toujours insaisissables ou bien noyées sous
les eaux voire dans le bocal en sirène de paillette.
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Titre : Suzhou River
Scénario & film :
Lou Yee
Acteurs : Zhou
Xhun, Jia Hongsheng, Nai An, Yao Anlian
Chef opérateur :
Wang Yu
Musique : Jörg
Lemberg
Production : Arte,
Studio Babelsberg GMBH, Uplink CO, Goutte d’Or
Distribution
Producteurs : Nai
An et Philippe Bober
Editeur : One Plus
One
Année : 2000
Durée :
83 minutes
Pays : Chine
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