HISSEZ LES COULEURS
Ce qui est désagréable dans nos sociétés
reposant sur la vitesse de réalisation, d'acquisition, puis
d'oubli, c'est que la transmission du savoir ne peut plus
s'effectuer. Les anciens ne parlent plus aux jeunes, les jeunes
plus aux anciens. En conséquence, la mémoire se perd. Pas
forcément l'histoire qui persiste tant bien que mal dans les
salles de classe, mais la mémoire qui se compose de petits
éléments divers, du quotidien, d'un passé qui ne rentre pas
dans les livres, mais qui constitue le sel d'une vie.
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Dans cette optique, le livre de Dominique
Battlin fait du bien aux neurones. Et oui, les affiches n'ont
pas toujours été ces espèces de mochetées pubeuses qui ornent
aujourd'hui nos abribus et encarts métropolitains. Il fut
un temps pas si lointain où elles éclataient de couleurs par
la grâce de la lithographie, où elles présentaient des dessins
qui transportaient le passant dans des contrées obscures,
en Afrique avec lions et guerres tribales, en Inde avec éléphants,
maharadjas et Shéhérazade en série. Et aussi où elles indiquaient
le format de l'image (Cinémascope, Totalscope, Dyaliscope...
etc) et le procédé de couleurs choisi (Eastmancolor, Technicolor...
etc).
Plus qu'un livre sur les affiches, Le souffle de l'Aventure
est donc un véritable livre de cinéma qui décrit par l'image
plutôt que par le texte tout un pan de l'histoire du cinéma.
Pas forcément le pan le plus prestigieux - pas question ici
de grands films d'auteurs qui ont changé la face du monde
par leur réflexion d'une justesse confondante -, mais tout
un espace cinématographique populaire où le film d'aventure
régnait en maître incontesté du box-office sur mer, dans la
jungle, dans l'Antiquité, dans le Far West ou avec une cape
et une épée. Et avec en tête d'affiche des Steve Reeves, des
Johnny Weissmuller, des Errol Flynn ainsi que des cohortes
de brunes sensuelles et de blondes lascives dont émergent
les noms de Lana Turner ou de Gina Lollobridgida.
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