NICOLAS
DUBOST
SE FAIT SON FILM Rencontre avec le dragon
d'Hélène Angel
Sorti de la salle de ciné, toujours
rien compris au film, pas de panique, cette chronique vous refait
le film. Les producteurs retiennent les spectateurs, les personnages
se demandent encore pourquoi ils ont accepté ce rôle. Qu’est
ce qui se passe dans leur tête, les dialogues qu’ils auraient
aimé dire, nous vous révélons la face cachée des scénarios.
On se refait le film, une critique inventive de vos films préférés,
ou pas… parce que le cinéma n’est pas un art sacré.
Le chevalier Guillaume de Montauban (Daniel
Auteuil) s’est perdu dans la neige. Il arpente les terres
de France, à travers les montagnes et les sables, pour livrer
Hugues de Pertuys au Pape. Les vers de Hugues (Titoff), ce
poète de l’amour, ne plaisent pas au Pape. Il préfèrerait
le voir brûler plutôt que supporter une ligne de plus de ces
écrits hilarants.
Mais le chevalier Guillaume est paumé. Il ne sait plus dans
quelle époque il vit. Tout ce qu’il voit lui rappelle le Moyen
Âge. Il aimerait se consacrer uniquement à sa mission, mais
tout un tas de brutes épaisses veulent lui confisquer son
petit protégé, et le livrer à sa place : « Arrêter
de me harceler avec vos épées, je dois donner ce plouc de
Hugues à ce grand Pape. » Félix, un gamin (Nicolas
Nollet), le pourchasse et se prend pour son écuyer. Il a lu
un grand livre relié de cuir, et il connaît par cœur la légende
de Guillaume, ce chevalier vêtu d’une coquille métallique.
Le chevalier errant n’est pas au bout de
ses peines. Un autre terrifiant chevalier du nom de Mespoulède
(Gilbert Melki) a lancé son armée de fidèles pour cogner Guillaume.
« Nous avons un combat à mener toi et moi, Guillaume,
lui dit-il. Tu vas arrêter de te défiler. Je ne me
sentirai pas en paix tant que je ne t’aurai pas collé une
bonne raclée, espèce de porc. » Guillaume est las.
« Qu’est ce qu’ils me veulent, tous, à espérer me
trancher la tête en deux. Je suis un chevalier, on m’appelle
Dragon Rouge. Pas le temps de céder à ces enfantillages. »
Guillaume le Dragon Rouge
n’est pas le plus pitoyable des chevaliers. Il a acquis son
titre en sauvant des flammes un homme. Il est plus fort que
le feu et son épée désarçonne les forêts les plus denses.
Les armées qu’il croise finissent proprement décapitées. Les
bras et les jambes se mettent à saigner, puis à gigoter par
terre. Il laisse derrière lui des torrents de larmes. Le chevaler
Guillaume n’a pas d’amis ; il aime les femmes, mais parvient
toujours à les tuer.
Mespoulède finit par lui voler son prisonnier,
Hugues de Pertuys. « Je me fous de ce prisonnier, garde-le,
sale porc toi-même, clame-t-il. Je suis beaucoup plus
chagriné par ce Moyen Âge. Je fais de drôles de cauchemars la
nuit, confie-t-il à son petit Félix. Il y a des démons. »
Un autre taré, Raoul (Sergi Lopez), vient contrarier sa traversée
des Alpes. « On ne peut plus admirer les montagnes.
Bande d’emmerdeurs, fulmine-t-il, je voudrais pouvoir
contempler ces pics, ces aiguilles et ces dévers fantastiques. ».
Raoul le suit partout. « Tu as tué ma femme, chevalier,
mais bon, je t’aime quand même. » Raoul a une étrange
façon de porter le deuil, il se transforme en sanglier poilu
à la nuit tombée.
Guillaume commence à ne plus rien comprendre quand la femme
morte de Raoul réapparaît. Cette femme fantôme ressuscite. Quel
ennui, Guillaume va-t-il être forcé de re-tuer la morte ?
Il semblerait.
L’Homme Sanglier et la Femme Fantôme, le poète de l’amour et
le gamin au gros livre, Mespoulède et son armée de brutes moyenâgeuses,
une bonne sœur enceinte (Emmanuelle Devos), le Moyen Âge de
Guillaume de Montauban est peuplé de paumés. Impossible de mener
sa croisade, avec cette bande de zinzins collée aux basques...