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Chaos (c) D.R.

TISSAGES, METISSAGES


Par Gilles LYON-CAEN


Au sein des récentes tendances françaises se dessine ici et là un nouveau terrain d’expérimentation sociale, porté par l’apport de la caméra DV ; principalement au vu de Loin d’André Téchiné et Chaos de Coline Serreau. Le particulier figure le général dans une esthétique qui feint souvent d’emprunter au documentaire, pour autant asséner ses vérités (le Chaos comme fourre-tout malade), que décrypter un réel foisonnant propice aux fictions parallèles (Loin). Des ponts se jettent, dans Chaos, entre petit destin individuel et nouvel héroïsme, rédemption bourgeoise et jeunisme triomphant. Mais Loin et Chaos sont deux blocs d’existences aux failles graciles, où la force politique et la faim de justice sont érigés en mode de récit, symptômes d’un mal être quotidien porté en bandoulière.


  Loin (c) D.R.
Fiévreux, Loin ne s’épuise que dans sa propre fuite, c’est un corps endolori par le soleil qui finit par rayonner de ses arias nocturnes. Chaos finalement s’apaise dans un montage coulé comme du papier à musique (les Variations Goldberg). Il a fallu emprunter des récits-carrefours pour tisser une harmonie musicale. Flirter avec la caricature puis flirter avec Bach (Chaos), entrecroiser des fils et les dénouer (Loin). Ce qui passionne, plus généralement, tient autant d’une choralité tendue (la fausse dispersion de Loin) ou distendue (la déstructuration de Chaos), qu’une impossibilité à se focaliser sur un visage, un caractère. Dans les deux films germe une maladie commune (aussi bien scripturale que visuelle) qui encercle la globalité poussive d’une société établie en strates, dont l’épicentre chaotique contamine la périphérie (les rêves d’évasion dans Loin). Chez Serreau ou Téchiné, même maîtrise de l’hystérie et d’une calme confusion qui fermente les apparentes perditions du récit. Dans Chaos, Mamie, incarnée par Line Renaud, est flanquée en dehors de la ville et au centre nodal du script. Personnage laissé-pour-compte qui réapparaît finalement, simple, dénudé, pour pointer du doigt l’inconsciente folie du fils/film, l’aliénation sociale qui gouvernait ce chaos en fusion. D’un globe tournant sur lui-même naît la fuite du sens : le récit s’arrondit, les mailles se consument.

Il a été dit que le choix de la caméra DV témoigne parfois d’un manque d’inspiration et d’une facilité dans la recherche du point de vue... Et si Chaos traduisait la fin des vaines recherches dans ses sincères et malades expériences (le retour au snuff téléfilm, le témoignage en regard-caméra de Malika, le micro-film servant de flashback) ? Et si Téchiné et Serreau, dans leur emploi de la caméra DV, posaient les bornes d’un cruel renouveau, le signal d’une impossibilité à figurer les chassés-croisés, le tissage des circulations entre communautés (les familles dans Chaos) et exilés (ceux qui partent, ceux qui restent dans Loin) ?





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