EPISODE 4 : " Tous
Ego "
Où l'on voit que la vie suit son
cours
Et la question subsiste. Sur toutes les
lèvres. Quel est son nom ?
Bush ? Gore ?
La réponse cingle et résonne
: Shaft.
C'est le principe moteur de la bande-annonce,
et globalement du marketing du film de John Singleton : faire
revenir à la surface un souvenir que je n'ai pas en
mémoire. " Il est toujours là ", me dit l'affiche.
Oui, très bien. Mais Shaft, c'est davantage
ce que j'en sais que ce que j'en ai vu. Et ce que j'en sais,
c'est pas grand chose : film phare de la Blaxploitation et
surtout, surtout la musique indispensable d'Isaac Hayes. Je
dois être dans la moyenne, vu que la bande-annonce mise
exactement sur ces deux ingrédients : le super-héros
black que sa réputation (son mythe) précède
" quel est son nom ? ", et la musique.
Là-dessus, la construction est simple
: plan éloigné du mythe : une silhouette, une
ombre fugace, apparaissant plus nettement au fur et à
mesure ; scène du film : de l'action ou des répliques-qui-tuent,
ou les deux, pourvu que ça dépote ; et la question
fatidique dans toutes les bouches, sur toutes les lèvres
: quel est son nom ? ; etc, en boucle. Jusqu'à la réponse.
Les acteurs, les personnages sont noirs
et une question, une vraie, éclôt dans mon esprit
devant cette bande-annonce (qui n'a pas le temps d'en fournir
la réponse) : quelle place pour (ou contre) les blancs
dans cet imaginaire ? Non pas pour réclamer quoi que
ce soit ou tomber dans un dédain à peine raciste.
Seulement, deux petites choses, deux allusions anodines (tellement,
qu'elles ne sont peut-être que le fruit de mon esprit
tortueux ?) rebondissent subrepticement au cours de la bande-annonce
: une image puis une réplique. La première apparition
de Shaft, venant du fin fond de l'image (est-ce bien lui,
d'ailleurs ?), le montre absolument habillé, de la
tête aux pieds, en blanc. Image furtive, dépourvue
de sens, puisque aussitôt balayée, et qui pourtant
résonne immédiatement lorsque Shaft, plus loin,
demande à celui qui doit être un collègue
: " est-ce que t'as pensé à mon verre de lait
? ". A ce moment-là, la bande-annonce, jusqu'alors
insipide, produit un effet (lequel ?) et attise ma curiosité
dans un crescendo digne du thème d'Isaac Hayes qui
la sous-tend ; seul véritable intérêt
du film, je crois finalement. Demain, je remplace mon disque
usé.
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C'est pas le tout, mais le temps passe et,
si l'Amérique piétine, en France on avance.
Sans aucun doute. Plutôt deux fois qu'une. On nous annonce,
dans la même semaine, la réduction du temps de
travail de Pascal Sevran (dont La Chance Aux Chansons passe
en hebdo en janvier 2001) et l'arrivée, ce vendredi,
de la nouvelle émission produite par Delarue, Tous
Ego.
Il va sans dire que l'annonce du départ
en pré-retraite de l'animateur favori des post-retraités
(il a fait son temps !) a provoqué un séisme
d'amplitude maximale dans toutes les rédactions des
hebdos télé de France. Celles-ci ont été
(et sont) inondées de courrier passionné et
déchirant, affluant de la France entière, et
réclamant à corps et à cris (parfois,
sous forme d'odes ! si, si je l'ai vu dans Télé
Star) qu'on leur rende Pascal Sevran. C'est tellement beau,
tellement déferlant que oui ! lançons le téléthon
de Pascal Sevran, sous le haut parrainage de Georgette Lemaire.
Ne laissons pas la France se morfondre.
Pour ma part, j'essaie bon an mal an de
me consoler. Et c'est pas facile ! Ça me remue le tréfonds
de l'âme. Heureusement qu'il y a ce nouveau bonheur
télévisuel, Tous Ego.
C'est la nouvelle idée neuve de Jean-Luc
Delarue. Après Ça Se Discute, Jour Après
Jour et C'est Mon Choix, il a eu cette idée inédite
de faire témoigner des anonymes. L'émission
nous emmène à la rencontre de la France profonde.
Par séquences d'une minute, nous découvrons
des gens banals et parfaitement farfelus : qui organise des
défilés d'habits anciens, qui reproduit Versailles
son et lumière dans son garage, qui peste contre les
chiens qui aboient, qui rend hommage à Tino Rossi (trop
oublié), qui fait des sculptures en mie de pain ("
je fais ça depuis 20 ans, mais cinq minutes avant de
le faire, je savais pas que j'allais le faire ", tu m'étonnes
!). C'est télébobine ressuscité, sans
le camion et à la maison.
C'est du cinéma brut de décoffrage.
Alain Cavalier peut remballer sa DV. A la différence
que le cinéma invite encore à lever les yeux,
alors que la télévision, quittant son piédestal
(le meuble tv) et finissant de plus en plus fréquemment
par terre, invite à les baisser.
Dans quelques semaines, on ne parle plus
que de ça. Tous Ego : bientôt culte.
Bonjour chez vous !
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