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Lost In La Mancha (c) D.R. NICOLAS DUBOST
SE FAIT SON FILM


A propos de Lost In La Mancha
de Keith Fulton et Louis Pepe
Par Nicolas DUBOST



Sorti de la salle de ciné, toujours rien compris au film, pas de panique, cette chronique vous refait le film. Les producteurs retiennent les spectateurs, les personnages se demandent encore pourquoi ils ont accepté ce rôle. Qu’est ce qui se passe dans leur tête, les dialogues qu’ils auraient aimé dire, nous vous révélons la face cachée des scénarios. On se refait le film, une critique inventive de vos films préférés, ou pas… parce que le cinéma n’est pas un art sacré.


  Lost In La Mancha (c) D.R.

Terry Gilliam avait patienté dix ans avant de filmer une grande adaptation de Don Quichotte au cinéma. Ça commençait à bien faire. « Maintenant on tourne, clamait-il, mais tournez putain de dieu ! » «  - Il nous manque la moitié des acteurs patron, et puis la couleur du ciel n’est pas raccord. » « - Je m’en fiche, peignez-moi tout ça en bleu ciel. Moteur ! ».

Pour son film sur les aventures de l’excentrique Don Quichotte, Terry Gilliam avait invité deux réalisateurs de documentaire : « Vous allez me produire un superbe doc, genre making-of, de mon tournage. Je veux des témoins au cas où ça tournerait mal. » Les Américains lui avaient tellement pourri la vie lors de la sortie de Brazil en 1985 qu’il avait décidé de se passer du talent d’Hollywood. « Je vais le faire avec les gentils Européens mon film. »

Lost In La Mancha (c) D.R.

Terry Gilliam gueulait la même chanson à toutes les réunions de préparation de tournage : « On est en pré-production les mecs, je veux que ce terme rentre bien profond dans vos têtes. Pas question qu’on se plante pendant cette période. Les budgets deux fois dépassés, c’est fini. Ce film ne va pas tourner comme Les aventures du baron de Münchhausen en 1988, c’est moi qui vous le dis. Je ne compte pas me faire entuber pas des putains de notes de frais trop importantes. Je ne revendrai pas ma mère pour rembourser cette fois. » Les producteurs de Don Quichotte l’avaient à l’œil. « Ils ne comprennent pas ces crétins qu’on ne fait pas un film avec que dalle comme budget. Ils me donnent trente-deux millions de dollars, qu’est ce que c’est que cette merde. Mon Don Quichotte est sensé attaquer des moulins, ils n’ont pas lu le livre ou quoi ? Je dois fabriquer des pantins gigantesques, je vais pas les faire en papier mâché. » Tous des cons ces producteurs, ils ne connaissent rien à l’art. Des chéquiers avec des pieds et pas de tête !

Terry Gilliam avait bien du souci à se faire. Ses pantins coûtaient une fortune, les acteurs se foutaient de lui en loupant leurs avions. « Et Vanessa Paradis, pourquoi elle n’est pas aux répétitions pour son rôle, demandait-il à son assistant réalisateur, elle se prend pour une chanteuse ou quoi ? » Non, rien ne se déroulait comme sur les plans de travail, mais Terry voulait le faire son film de dix ans. « Une décennie de réflexion, ça se respecte. »

  Lost In La Mancha (c) D.R.

Au lieu d’une grande épopée chevaleresque, on était en train de filmer le Titanic. Cette satanée baraque prenait l’eau de toute part. Le Cinéma se mourrait, Terry en était convaincu. Il y avait des tempêtes sur le lieu de tournage et des torrents de boue. Terry n’y croyait pas : « Je ne savais pas que j’aurais à tourner dans une rivière. Il y a quelque part un petit salopard qui veut me voir manger de la boue. » Jean Rochefort ne faisait pas le malin, il avait une double hernie discale. Impossible de monter à cheval. Les chasseurs bombardiers de l’O.T.A.N. venaient même le narguer jusqu’au-dessus du plateau. Avec ce boucan, plus possible de comprendre l’anglais de Rochefort.

Et ça devenait tout à fait inéluctable. Presque un poème le film de ce film. Ce dingue de Don Quichotte se battait contre des géants et affrontait des moulins à vent. Terry continuait désespérément à tenter de réaliser son film alors que les acteurs s’enfuyaient et que les producteurs cherchaient à lui bricoler un cercueil.

C’était un Don Quichotte ce Terry Gilliam. Il lui avait piqué son costume.



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