Ces choix, emblématiques
de la personnalité du metteur en scène, introduisent des moments
intenses et des temps morts dans la narration cinématographique,
entraînant ainsi une suite de ruptures et de contrastes et
un véritable rythme à l’intérieur de l’œuvre. Dans Vatel,
pareil regard sélectif est totalement absent : spectateur
comme caméra semblent laissés à l’abandon dans un univers
foisonnant de mouvements mais dépourvu d’intrigue réelle.
Le film souffre par conséquent d’une uniformité de ton flagrante
et d’un rythme extrêmement monotone, le tout accompagné d’une
musique d’époque purement illustrative, qui n’a aucune fonction
dramatique et n’intervient jamais en contrepoint du récit.
Ainsi, la séquence du jeu de cartes, où le Roi invite le Prince
de Condé à mettre Vatel en jeu, est traitée, du point de vue
de la réalisation, avec la même désinvolture et la même indifférence
que l’invention de la crème Chantilly... La prise de conscience
d’un état proche de l’esclavage était pourtant un des thèmes
vitaux de cette page historique mais, évoquée à la va-vite,
elle est totalement négligée par rapport aux possibilités
scénaristiques qu’elle recelait : le sacrifice des perroquets
de Vatel est quasiment filmé avec plus d’émotion et de compassion
que le sacrifice de Vatel par Condé…
|
 |
|
|
Si l’on ajoute à tous ces
travers les clichés les plus éculés sur la Cour du XVIIe siècle,
de la chaise percée de Louis XIV à l’homosexualité outrancière
de Monsieur, on peut donc estimer que Joffé, s’il a su rendre
attrayant et chatoyant le banquet filmique auquel il nous
avait invités, a par contre totalement échoué à conserver
notre appétit durant l’ensemble de la représentation : Vatel
est semblable à une réception princière où décors, musiques
et spectacles couperaient le souffle aux convives avant qu’ils
ne se rendent comptent que leur hôte a malencontreusement
oublié de songer au principal, le menu. Totalement indifférent
à développer et à exploiter les capacités d’un scénario qui
dépasserait l’anecdotique et l’artificiel, Roland Joffé, bien
loin du talent qui était le sien lorsqu’il réalisa La
Déchirure, semble être devenu un piètre amphitryon cinématographique…
 |
|
Titre :
Vatel
Réalisateur :
Roland Joffé
Acteurs : Gérard
Depardieu Julian Sands Louis XIV , Timothy Spall
, Tim Roth , Uma Thurman , Julian Glover , Arielle
Dombasle , Marine Delterme, Féodor Atkine , Vincent
Garnier
Directeur de la photographie
: Robert Fraisse
Compositeur : Ennio
Morricone
Chef monteur : Noëlle
Boisson
Producteurs : Alain
Goldman, Roland Joffé
Production : Gaumont,
Légende Entreprises, Timothy Burrill Productions
Limited, StudioCanal, TF1 Films Production, Nomad
Films, Belgique
Distribution : GBVI,
France
Durée : 1h57
Année : 2000
|
|
|