Sorte d’hommage du cinéaste
le plus célèbre du monde a l’un des plus grands
cinéaste du monde,
AI revendique explicitement
l’héritage de Kubrick. Comme chacun sait, Spielberg
a repris et concrétise un vieux projet de l’auteur
de
2001 . Evidemment, ce qui nous est donné
à voir n’a pas grand-chose en commun avec l’univers
de Kubrick, mais le résultat confirme les craintes
que l’on pouvait nourrir lorsqu’on a su que Spielberg reprenait
le projet. Le scénario a été entièrement
réécrit pour passer dans la moulinette hollywoodienne
des bons sentiments. On comprend pourquoi Kubrick aurait dit
à Spielberg que cette histoire convenait mieux à
sa sensibilité. Pointe d’ironie ?. Car
AI est
du 100% Spielberg, son jeune robot (joué par l’horrible
Osment) rappelant plus E.T que HAL. Au fond, la complicité
entre ces deux cinéastes repose peut-être sur
un malentendu : le goût des effets spéciaux et
de la technique. Car ces deux œuvres semblent profondément
différentes, pour ne pas dire antinomiques. Le pessimisme
quasi nihiliste de Kubrick est incompatible avec l’humanisme
béat, limite boy scout, de l’auteur de
Jurassik
Park, l’ironie du premier n’est guère caractéristique
du second etc.
Elément intéressant à noter : Spielberg
a réécrit lui-même le scénario,
ce qu’il ne fait plus depuis belle lurette. C’est dire qu’il
a manifesté une ambition d’auteur bien dans l’esprit
de Kubrick. C’est peut-être là que le bât
blesse : d’abord son script manque fâcheusement de rythme,
comporte beaucoup de longueurs et suscite souvent l’ennui.
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De plus, l’histoire n’est pas si originale
et reprend le schéma ancestral des contes et mythes,
de sorte qu’on est plus proche du George Lucas de La guerre
des étoiles que de Kubrick. Ainsi toute la première
partie n’est qu’une variation sur Œdipe, Spielberg reprenant
même la situation du berger épargnant l’enfant
Œdipe dans la scène où la mère lâche
David dans les bois au lieu de l’amener à la casse.
Plus encore, Spielberg veut délivrer sa pensée
et assène, notamment dans la dernière partie,
située dans 4000 ans, à mon sens complètement
ratée, des discours démonstratifs qui ne brillent
guère par leur profondeur. On est loin de l’expérience
non verbale que Kubrick cherche à atteindre.