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Amen (c) D.R. AMEN
de Costa-Gavras
Par Anthony SITRUK


SYNOPSIS : Années 30, arrivée du nazisme au pouvoir en Allemagne. Les premiers improductifs (les handicapés) sont supprimés par le régime, gazés dans les douches des hôpitaux psychiatriques. Devant les réactions du Vatican, l'extermination est annulée en apparence. Mais celle des juifs va commencer. Années 40, seconde guerre mondiale. La machinerie nazie se met en route pour fonctionner à plein régime, jusqu'à la fin de la guerre et la défaite du parti de Hitler. Entre temps, profondément choqué par celle extermination, l'officier SS Gerstein, va s'acharner à sauver le plus de prisonniers possible, tout en essayant d'avertir le Pape Pie XII par l'intermédiaire d'un jeune jésuite, Ricardo Fontana.

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L'HISTOIRE, DE NOUVEAU EN MARCHE


  Amen (c) D.R.

Mouvements. Mouvements des dossiers, des trains de la mort, des prisonniers, des généraux, etc. Tout n'est finalement que mouvement dans la machinerie nazie que décrit Costa-Gavras dans son dernier film. Ce mouvement que la caméra suit superbement, dans sa volonté de montrer l'Histoire, qui selon la formule de Toynbee, est " de nouveau en marche ". Une scène symbolise le mieux tout le film : Kurt Gerstein, scientifique travaillant pour les nazis, est présenté par un tiers au médecin chargé de mettre en place la solution finale. Un dossier passe alors des mains de ce médecin, à celles de l'intermédiaire, pour terminer dans celles du scientifique. Dossier suivi de près par la caméra qui le fixe, ne le lâche plus. Car ce dossier, à l'origine, parmi tant d'autres, du génocide juif, montre la dimension implacablement administrative de ce massacre. Le film prend sa force dans ce désir de comprendre et de montrer la raison pour laquelle ce génocide reste, n'en déplaise à tous les nouveaux révisionnistes, partisans de l'égalité devant le souvenir et l'Histoire, totalement unique et originale dans sa morbidité. L'aspect administratif et "légal" du génocide juif a par ailleurs succédé à un désir de paix absolu (l'idée d'Alain selon laquelle " tous les maux que nous voulons éviter par la guerre sont moindres que la guerre elle-même "). Oser montrer aujourd'hui cette différence, est une grande preuve de courage de la part du cinéaste, qui retrouve, le temps de quelques scènes, la puissance de ses plus grandes œuvres.

Images fortes, celles des trains de prisonniers juifs, trains vides ou pleins, dont la répétition rythme le film, et rappelle le fonctionnement ininterrompu de la machinerie meurtrière. Pendant que certains discutent, simples spectateurs engagés ou pas, l'administration suit son cours. " Les hommes qui dirigeaient cette guerre n'ont rien voulu faire de manière explicite pour les juifs " comme le dit Raymond Aron. Et les trains remplis avancent vers les camps de la mort, dont les rendements sont rapidement édifiants (voir le décompte des morts dans la dernière partie du sublime documentaire Sobibor, 14 octobre 1943, 16 heures). Images glaçantes, échos de cette scène où Gerstein observe avec effroi le résultat de la solution finale, à travers le trou dans la porte donnant sur une chambre à gaz. En jouant sur l'absence volontaire du contre champ, Costa-Gavras définit la solution finale comme l'horreur ultime, immontrable, indicible.

Amen (c) D.R.
Malgré toutes ses bonnes intentions, le cinéaste, au lieu de centrer son film sur la machinerie bureaucratique du génocide juif, choisit de se disperser dans la deuxième partie. D'où l'impression persistante d'assister à deux films en un, proposant chacun un point de vue différent sur une même période. En s'attaquant au terrible sujet du silence du Vatican devant les massacres juifs, le cinéaste se perd malheureusement dans une démonstration ampoulée, dont la lourdeur est amplifiée par le jeu appuyé de Mathieu Kassovitz. Ne sachant plus que faire, tiraillé entre les supplications de certains de ses cardinaux et ses sympathies allemandes, le pape Pie XII garde le silence, ne fait rien pour défendre les juifs, jugés par le parti nazi comme improductifs, et responsables de la défaite allemande lors de la première guerre mondiale. Alors que Pie XI avait condamné l'Action Française de Maurras, et l'antisémitisme, Pie XI joue le jeu des nazis en déclarant que " le souverain pontife doit rester au-dessus de la mêlée sil veut être le Père de tous ". Faits admis depuis longtemps, retranscrits avec fidélité par le cinéaste, mais dépourvus de toute l'ambiguïté ou de la profondeur qui auraient rendu le film moins didactique. Toutes les scènes situées au Vatican perdent ainsi une grande part de leur intérêt. Pour le cinéaste, tout le monde est coupable : il y a quelque chose de pourri dans le plus petit Etat du monde. Costa-Gavras enfonce les portes ouvertes en tentant de montrer que personne n'a voulu lever le moindre petit doigt pour sauver les juifs. Et commet la faute irréparable, l'erreur impardonnable, en tournant son film entièrement en anglais. Tout le monde se comprend, tout le monde parle anglais, qu'on soit français, allemand, italien, ou polonais, et le film perd toute la force que pouvait lui apporter cette barrière de la langue effroyable dans un camp de concentration. Dommage. Le cinéaste le plus primé du monde rate l'inscription d'un nouveau chef d'œuvre à son palmarès.




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Titre : Amen
Réalisation
: constantin Costa-Gavras
Scénario : constantin Costa-Gavras, Jean-Claude Grumberg
D'après  : Le Vicaire
De : Rolf Hochhuth
Photographie : Patrick Blossier
Monteur : Yannick Kergoat
Costumes : Edith Vesperini
Mixage : Dominique Gaborieau
Musique : Armand Amar
Acteurs : Ulrich Tukur, Mathieu Kassovitz, Ulrich Mühe, Michel Duchaussoy, Ion Caramitru, Marcel Iures
Production : Renn Productions, KG Production
Producteur : Claude Berri
Producteur exécutif : Michèle Ray Gavras
Distributeur : Pathé Distribution
Sortie France : 27 février 2002
Durée : 2h 05 mn
Pays  : France
Année : 2001