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Irreversible (c) D.R. FESTIVAL DE CANNES 2002
Sélection officielle

IRREVERSIBLE

de Gaspar Noé
Par John Jefferson SELVE


SYNOPSIS : Parce que le temps détruit tout. Parce ce que certains actes sont irréparables. Parce que l’homme est un animal. Parce que le désir de vengeance est une pulsion naturelle. Parce ce que la plupart des crimes restent impunis. Parce ce que la perte de l’être aimé détruit comme la foudre. Parce ce que l’amour est source de vie. Parce ce que dans un monde bien fait le tunnel rouge n’existerait pas. Parce ce que les prémonitions ne changent pas le cours des choses. Parce ce que le temps révèle tout. Le pire et le meilleur.

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POINT DE VUE

  Irreversible (c) D.R.
Un steadycam affolé nous conduit immédiatement à travers un arkanoid mental des plus primitifs, la caméra se cogne contre les parois d’un immeuble aussi glauque que possible, à la recherche d’une ouverture, d’une échappée, d’un trait de lumière absolument improbable. Au plan suivant la musique de Thomas Bangalter (moitié de Daft Punk) s’immisce sourde et heureuse de la claustrophobie ambiante. Nous sommes là aux prémisses du film et à sa quintessence qualitative. De cette scène d’exposition, Gaspar Noé livre le meilleur de lui-même : une traduction de la violence mentale qui l’habite, la mise en place de la sensation, la naissance des pulsions qui sont à même de se déployer par la mise en scène originale et talentueuse du réalisateur ainsi que par le traitement singulier de la bande-son qui participe comme chez Lynch au (re) sentiment du film.

Le propos de ce film symptomatologique est ici la Réaction au sens le plus Nietzschéen du terme, Noé utilisant comme Postulat le viol d’une femme pour observer la réaction de son mari. Face à cette situation abjecte, nous serons alors pris dans une dialectique pulsionnelle, un vortex qui ne laissera définitivement aucune place au recul, à la distance offerte en temps normal par la pensée pour ne plus laisser place qu’aux estafilades amorales de notre société.


SYNDROME OCCIDENTAL

L’horreur s’introduit donc dans ce petit couple bourgeois, le drame est un retour de force comme le boomerang d’une société déliquescente, compulsive, illustréé par un pandémonium représenté par le Rectum, boite de nuit homo-trash dont la symbolique topographique, onomastique et anatomique n’est guère à expliciter ( le violeur se surnomme le Ténia...)

Irreversible (c) D.R.
Dans un incipit où nous retrouvons le personnage du boucher de Seul contre tous évoquant dans une pièce à l’aspect peu ragoûtant l’inceste qui l’a conduit en taule, nous entendons son interlocuteur lui répondre placidement qu’il s’agit du syndrome occidental de notre époque.

De cette phrase va s’inoculer un certain regard anthropologique de la bassesse humaine. Toute société est fondée sur le tabou de l’inceste, nous le savons depuis Lévi Strauss, et le meurtre est encore pour le moment un acte contre nature. En nous les infligeant comme postulats visuels, Gaspard Noé s’attaque au noyau, au ver dans le fruit de notre société intestinale, métastasée à n’en plus finir, pour remonter à rebours le cancer moral de notre époque.