SYNOPSIS :
Dix séquences de la vie émotionnelle de six femmes
et les défis qu'elles rencontrent dans une étape
particulière de leur vie, qui pourraient aussi bien être
dix séquences de la vie émotionnelle d'une seule
et unique femme... |
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POINT DE VUE
Dix séquences, un
huis clos, une voiture. Une femme au volant qui prend des
passagères. Et, d'abord, ce que Ten n'est pas
: un portrait de " la femme iranienne " de nos jours
en plans fixes, plusieurs volets ou voyages. Mais plutôt
la tentative de sonder qui se cache derrière le regard
et les lunettes d'une femme : au cours de Ten, nulle
réponse mais un amas de questions intrigantes, déclinaison
dune énigme (le visage d'une femme devenant icône).
Une attention particulière qui se traduit par l'écoute
dune voix érotisée, flux caressants dont on
saisit moins les propos énonçant des vérités,
qu'on écoute, fasciné, les basses langoureuses
qui émanent d'une bouche surnaturelle.
Ten est d'abord l'histoire
de cette voix féminine, l'écoute dun corps politique
comme forme de raccord et point de ralliement de voix nationales.
Ten préfère le débat, la parole
active au soubresaut, à la révolte commune.
Immersion dans le réel en marche avant, le film
érige la conversation ou le récit oral comme
autant de routes à emprunter, les corps étant
configurés dans un espace restreint (une place assise),
leur parole scandée par deux caméras qui les
surveillent autant quelles les enregistrent. Ici, la parole
verse dans la fronde, la colère, pure logorrhée
et joute verbale qui déstabilise l'harmonie du cadre
(on coupe la parole mais s'attarde sur le corps) et l'alchimie
des couleurs (le blanc incandescent, le bleu nuit des extérieurs).
Toujours, le discours du film et de la femme prônent
l'échange et ouvre d'autres récits et fenêtres
entrouvertes sur le réel.
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Le réel, maître
mot du corpus iranien qui écume salles et festivals,
Kiarostami le scénarise autant qu'il le provoque. Ten
s'apparente à un dispositif étanche qui modernise
l'idée de cinéma d'André Bazin, en ne
cessant de déborder du cadre. La projection du film
a lieu jusque sur les murs de la salle ; prolongement du réel
dans le son, le trafic alentour : les lignes fermes de la
voiture cachent par transparence (procédé et
trucage que détourne Ten) les lignes de fuite
du réel hors-champ. De la fin du Goût de la
cerise à Ten, l'emprise sur le réel
de Kiarostami diminue à mesure que se creuse la part
d'humanité inouïe qui gît derrière
l'image DV, propre et chaude. L'urgence de la parole, le jeu
d'allusions entre champ et hors-champ, la croyance en une
réalité scénarisée se doublent
dune intensité émotive par rayons, faisceaux
lumineux, respirations du cinéaste, grains vidéo
épousant grains de peaux comme un adoucissant. Un tour
de force souverain, proche d'une expérience hypnotique
que parachève un subtil effet de bascule
final : la main de la conductrice traverse la ligne, le split-screen
qui la séparait de son amie, et lui caresse le visage.
Ce qui bouleverse provient d'une libération, ce sera
le premier et seul contact de Ten et le seul
accord, acquis dans le silence. Se produit une fracture de
l'image et de la parole, mais l'espoir perdure, décisif
: si la ligne qui séparait les deux femmes se brise
soudainement, elle libère néanmoins la passagère
(qui se découvre) et les apaise (elle réunit
les corps).
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Titre : Ten
Réalisateur :
Abbas Kiarostami
Interprètes :
Mania Akbari, Roya Arabashi, Amin Maher, Katayoun
Taleidzadeh, Mania Akbari, Roya Arashahi, Mandana
Sharbaf, Amene Moradi, Amin Maher
Musique : Howard Blake
Producteur :
Abbas Kiarostami, Marin Karmitz
Presse : Monica Donati
Distribution :
MK2
Festival : Sélection
Officielle du Festival de Cannes 2002
Pays : France,
Iran
Année :
2001
Sortie France : 18 Septembre
2002
Durée : 1 h 31
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