Reprenant le même contexte et les mêmes acteurs que Lilian, Thirteen appartient pourtant au domaine de la fiction. Thirteen en constitue cependant le prolongement : après nous avoir fait découvrir l’univers de Lilian, Thirteen est l’occasion pour David Williams d’une chronique des premiers pas de la fille de Lilian, hors de l’univers familial. Dès lors, autant Lilian était un film solennel et dense, autant Thirteen est un film lumineux et vagabond, un film choral où la figure encore incertaine de l’adolescente se modèle dans les rencontres qui le ponctuent. Entre chronique adolescente et " Candide américain " documentarisant, Thirteen élabore l’image optimiste, d’une société où les différences raciales, culturelles et sociales sont autant de sources de rencontres potentielles. Tous accueillent la petite Nina avec la même simplicité chaleureuse. Et c’est la force du film que de dégager un tel sentiment de bonté, dans la soustraction du pathos. Thirteen est un film grave, où l’innocence est constamment empêchée par l’âpreté de l’image, la banalité des situations.

La finesse de Thirteen est de donner à voir l’adolescence comme cet instant de transition où, alors qu'elle est encore une enfant, la jeune fille est dépendante de ses aînés (ce qui en passe par les " services " qu’ils lui rendent : la conduire, la conseiller) ; et où l’aspiration à l’indépendance met au jour des responsabilités à l’égard des autres. Le détachement nécessaire à l’autonomie adulte se décline dès lors dans le détachement affectif vis-à-vis de la famille, mais aussi de sa propre vie. Des images oniriques ponctuent l’action, qui donne à voir l’itinéraire de Nina comme une séparation de l’enfant qu’elle a été. La dimension ouvertement mythique du thème de l’initiation fait s’épanouir l’inventivité de Williams, qui atteint dans sa mise en scène la délicatesse et la poésie d’un artiste " Brut ". La versatilité des représentations - sont convoqués le film à suspense, le fantastique, la comédie sociale, l’onirisme - et la liberté formelle, qui pointait déjà dans le " fantastique du quotidien " à l’œuvre dans Lilian se font ici réflexives. La recherche de l'identité de Nina s’offre à penser dans les formes mêmes de Thirteen. L’investigation esthétique s’opère alors dans la comparution d’objets " d’art " : toiles abstraites de l’ami de la famille, objets saint-sulpiciens appartenant à Lilian. La trajectoire du film amène ainsi Nina, au terme de son initiation, à s’offrir un aquarium, un objet à regarder et admirer : c’est-à-dire une forme de beauté.

Acheter ce livre ou DVD sur le site : Fnac Acheter ce livre ou DVD sur le site : PriceMinister Acheter ce livre ou DVD sur le site : Amazon Acheter ce livre ou DVD sur le site : Librairie Lis-Voir