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Elling (c) D.R. ELLING
de Petter Næss
Par Jean-Pierre TABONE


SYNOPSIS : "Je suis ce que l'on pourrait appeler un fils à maman". Elling, petit bonhomme anxieux aux allures de garçonnet vient de perdre sa mère. Il a vécu quarante ans avec cette femme qui régimentait totalement sa vie. Maintenant, il est complètement désorienté. Les services sanitaires et sociaux de la ville d'Oslo (Norvège) le placent dans une institution pour personnes souffrant de légers désordres mentaux. Il partage la chambre d'un colosse aux pieds d'argile, Kjell, qu'Ellling surnomme l'"orang-outan". Les deux principales préoccupations de ce dernier se situent au niveau de la ceinture : nourriture et sexe, même si, également quadragénaire, Kjell n'a encore jamais pratiqué la chose. Une amitié va rapidement naître entre les deux hommes. Elling délecte son compagnon de chambrée de récits imaginaires dans lesquels actions rocambolesques et femmes aussi plantureuses que peu farouches ont la vedette. Deux ans plus tard, les mêmes services sociaux décident de placer le duo dans un appartement géré par la municipalité. L'heure de la réhabilitation a sonné et il est temps pour les deux compagnons de voler de leurs propres ailes. Cette tache se révélera un véritable parcours du combattant pour ces assistés de la vie. Ils seront épaulés par un jeune animateur social, Frank Asli, qui essaiera de remuer l'indolence des compères. Un seul objectif : réussir leur intégration sinon retour à la case départ.

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LES GENS ANORMAUX N'ONT RIEN D'EXCEPTIONNEL

  Elling (c) D.R.
Disons le tout de go, Elling n'est pas un film qui restera dans les annales du cinéma mondial comme étant une œuvre d'exception. L'ambition du réalisateur, Petter Næss, ne s'est d'ailleurs jamais située à ce niveau-là et le spectateur, en entrant dans la salle, sait à quoi s'en tenir. Elling est une comédie sociale suffisamment intelligente pour concilier les attentes d'une audience de cinéma d'auteur et d'un public plus large. Elle se situe ainsi dans la lignée des films de Robert Guédiguian, le côté vindicatif en moins (quoique). Petter Næss utilise, jusqu'à la trame, toutes les ficelles d'un thème souvent utilisé au cinéma : le duo composé de personnages que tout, ou presque, oppose. Différents mais complémentaires, Elling et Kjell surmonteront ensemble les difficultés de la vie quotidienne. Comme le réalisateur le spécifie "mon but était de montrer comment on peut arriver à vaincre ses peurs et à transcender ses propres défis. Et à côté de cela, voir en quoi comment l'amitié peut y contribuer." Elling, agoraphobe, confirme : "il y a des gens qui vont skier au pôle Nord et moi, je suis incapable de franchir le seuil d'un restaurant". Heureusement, le solide Kjell est là pour l'aider.

Avant d'être porté à l'écran, Elling avait fait, un an auparavant ses preuves sur les planches. La pièce, Frères de sang, était elle-même inspirée d'un roman éponyme très populaire d'Ingvar Ambjornsen. Devant le succès rencontré, Petter Næss a repris les acteurs de la pièce, Per Christian Ellefsen et Sven Nordin, qui jouent respectivement Elling et Kjell. Næss, certainement conscient que le jeu d'acteur est différent d'un médium à l'autre, explique ainsi : "Dans un premier temps, j'avais voulu faire le film avec d'autres acteurs. Mais, n'étant pas parvenu, au bout de deux mois de recherche, à rencontrer des personnes qui collent bien aux personnages du film, je me suis résolu à travailler avec les comédiens de la version théâtrale du roman." Cela se ressent d'ailleurs à l'écran où l'on a l'impression que certaines scènes sont surjouées, victimes du jeu "expressionniste" des acteurs de théâtre. Axel Hellstenius, le scénariste du film, connaît bien l'univers d'Ingvar Ambjornsen pour avoir adapté quelques-unes de ses œuvres au théâtre. Il a étoffé la trame de la pièce qui, huis clos oblige, se jouait exclusivement dans l'appartement des deux compères. Il y a intégré notamment les scènes qui se déroulent dans la somptueuse campagne norvégienne. C'est pour dire que toute la petite troupe se connaissait bien. Le processus "Elling" ne s'arrête d'ailleurs pas là. Kevin Spacey, qui a apprécié le film lors de sa présentation à la dernière cérémonie des Oscars où il concourrait dans la catégorie "meilleur film étranger", a racheté les droits pour en réaliser une adaptation américaine. Le verra-t-on bientôt endosser les habits étriqués d'un petit personnage agité ?