Le cinéaste brouille les repères
du spectateur pour lui faire vivre l’événement
avec les protagonistes, de l’intérieur. Un effet provoqué
par la caméra mobile, vibrante, tremblante, bougeant
en tout sens, d’une redoutable efficacité, autant sur
le plan narratif que sonore.
L’action suit ainsi l’action parallèle de l’armée
britannique et celle du leader du Mouvement des Droits Civiques :
Ivan Cooper.
Au fur et à mesure que la marche se déroule,
la tension monte et le film entretient un suspense très
crispant qui met le spectateur dans un état de tension
extrême, de panique et de stress.
Un spectateur sortant de la salle est tout entier habité
par cette image-symbole du père Daly, brandissant un
mouchoir taché de sang comme un drapeau blanc, devant
les parachutistes, pour frayer un chemin aux hommes transportant
le corps d’un jeune de 17 ans tombé sous les balles
de l’armée.
C’est grâce cette représentation cathartique
du drame que le film est aussi efficace dans son message.
30 ans après les drames, Greengrass réussit
un coup de maître en réunissant des anciens habitants
de Derry et des anciens militaires britanniques pour tenter
enfin de cicatriser les plaies d’une guerre civile parmi les
plus violentes et les plus sanglantes de l’Histoire.
Film hommage et film libérateur,
Bloody Sunday
apparaît comme un vigoureux reportage de guerre qui
illustre brillamment un long combat pour la paix.
Un combat entre une armée puissante et une population
qui se rebelle, mais bien au-delà, une histoire intemporelle
et universelle à travers l’histoire et dans le monde
entier : du siège de Troie, au conflit israélo-arabe.
Une interprétation remarquable, un film poignant.