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Dragon rouge (c) D.R. DRAGON ROUGE
de Brett Ratner
Par Yves GAILLARD


SYNOPSIS : Will Graham (Edward Norton) échappe de peu à la mort sous les coups de poignard du médecin-légiste Hannibal Lecter (Anthony Hopkins) : celui-ci se révèle être l’assassin cannibale que Graham recherchait, alors qu’il lui apportait son aide. Quelques années plus tard, alors que Graham coule une retraite anticipée avec sa famille, son ancien patron, Jack Crawford (Harvey Keitel) se manifeste, et le relance avec insistance pour qu’il apporte son aide à une enquête difficile. Avec réticence, Graham accepte. Mais dans cette affaire complexe, sur les traces de " La Petite Souris " (tel que le surnomment les tabloïds : il brise les dents de ses victimes) Graham réalise qu’il n’y a qu’une personne capable de l’aider à percer les arcanes de l’esprit du tueur : son ennemi juré, Hannibal Lecter.

Une relation triangulaire s’installe alors, entre Lecter, Graham et " la Petite Souris " -de son " vrai " nom le Grand Dragon Rouge - ce dernier étant parvenu à entrer en contact avec celui qu’il considère comme son mentor dans l’art du meurtre. Être solitaire et obsédé par sa supposée laideur physique, le Dragon Rouge est l’anonyme technicien vidéo Francis Dolarhyde (Ralph Fiennes), hanté par des traumatismes d’enfance sublimés par la lecture de Wiliam Blake. Alors qu’il entame la dernière phase de sa transformation ultime en le Grand Dragon Rouge, la naissance impromptue d’une idylle avec une de ses collègues, Reba, une jeune femme aveugle et timide (Emily Watson), lui fait soudain goûter les douceurs de l’amour. Mais Graham est sur ses traces…


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POINT DE VUE

  Dragon rouge (c) D.R.
Deuxième adaptation du roman éponyme de Thomas Harris, Dragon Rouge s’offre en exemple du rêve secret que doit chérir tout producteur : revenir sur un " échec " passé, pour mieux le refaire dans la certitude d’un succès assuré. C’est en l’occurrence ici celui de Dino de Laurentiis qui, plus de 16 ans après la mise en chantier de la première adaptation du roman (Manhunter / Le 6e Sens de Michael Mann, 1985) retourne sur les traces d’un échec commercial qui le poussa à attendre presque une décade, avant d’exploiter à nouveau la licence sur un quasi-coup de poker : ce sera le très lucratif Silence des Agneaux, chronologiquement la " suite " de Dragon Rouge. Après Hannibal il y a deux ans, la trilogie " Lecter " se boucle ainsi sur une diachronie étonnante : le premier devient dernier, ce qui s’offrait chez Harris (chez Mann, aussi) comme l’esquisse d’un personnage dont le mystère confinait à l’absence, devient ici retour sur la genèse d’un succès. Quelque part, tout le projet Red Dragon vise à nier le film de Mann ; non pas en le surpassant, ou en le refaisant, mais en affirmant tout simplement que Le 6e Sens est si peu un film avec Hannibal Lecter qu’il convient d’en disperser les traces. La présence au générique du directeur de la photographie Dante Spinotti, qui composa les ambiances mortuaires et solennelles du 6e Sens, assoit cette ambition vaine, presque compulsive, d’effacement.

Red Dragon est donc à peine un film, plutôt un panorama fétichiste des réminiscences du Silence des Agneaux. Si des échos du 6e Sens apparaissent quand même, ce ne sont que comme formes vides, motifs repris avec paresse pour combler les interstices entre les apparitions de Lecter. Le traitement infligé au détective Will Graham est à cet égard éclairant. La silhouette dégingandée d’Edward Norton, ici grimé en ersatz de l’athlétique Graham interprété par William Petersen, fait du personnage une poupée molle, tout juste bonne à opiner du chef devant les sentences de sa némesis. Et la fatigue qui se lit sur ses traits imprègne sa composition jusqu’à la réduire à une présence machinale, un stand-in.