Objectif cinéma : XXX / Triple X de Rob Cohen avec Asia Argento (Points de vue)

Véhicule pour la star en devenir Vin Diesel, XXX reprend l’essentiel de l’équipe du succès inattendu que fut le rutilant Fast&Furious sorti l’été dernier : son scénariste, son réalisateur et donc, son acteur principal. Dès lors, plutôt que de faire appel à un ambitieux jeune loup venu du clip, c’est le vétéran Rob Cohen qui réalise ce " teenage James Bond ". Film d’espionnage, XXX ne l’est qu’en référence à des routines spectaculaires reprises sans imagination : une séquence de " réalité en poupée russe " issue de The Manchurian Candidate, une poursuite en snowboard actualisant Au Service Secret de sa Majesté… L’habituelle technique du copier-coller qui flatte mécaniquement une " culture " cinéphilique minimale. Incroyablement long pour ce qu’il délivre, XXX se contente bien souvent de placer un ordinateur portable et une veste griffée dans chacune de ses images, comme autant de fétiches susceptibles d’attirer son public ; mais en ne se déparant jamais d’une mise en scène vieillotte dans son académisme. Même la touche d’ambiguïté érotique apportée par Asia Argento est systématiquement tronquée par la balourdise de la mise en scène.

XXX tente d’insuffler un peu de renouveau aux clichés qu’il agite paresseusement : " bad boy " donné comme impitoyable et cinglant, à la libido active, Xander Cage aurait pu s’imposer comme un " anti-héros " plausible, alternative bestiale et tatouée à la désincarnation qui frappe les figures héroïques du cinéma hollywoodien contemporain (de Matrix à Mission Impossible 2). Mais le film souffre d’un évident manque de courage dans le déploiement de cette figure relativement originale par sa méchanceté intrinsèque : avec indifférence, XXX rogne sur le potentiel détonnant de sa créature pour le récupérer quand même dans le consensus. Le projet de rendre un peu de chair et de sueur aux héros est miné par la confusion, toute mercantile, qu’opèrent ses promoteurs de fusionner esthétique " gangsta rap ", sports extrêmes et haute technologie corporatiste dans une forme de jeu vidéo. XXX délivre ainsi quelques séquences où les débordements pyrotechniques s’offrent comme transposés directement d’un univers ludique, sans autre enjeu que la réussite d’un enchaînement de gestes aboutissant à la " cascade-combo ". L’angoisse du faux-fuyant des apparences inhérente au film d’espionnage, brillamment décanté par Mission Impossible, ne va cependant pas jusqu’à travailler les personnages eux-mêmes, les " camps " restant clairement définis.

D’autre part, XXX révèle malheureusement peu d’humour dans la confrontation de ce terroriste pour rire avec la " réalité " d’une véritable action terroriste. Sans finesse, XXX insiste au contraire avec le sérieux d’un prêcheur sur la nécessité, pour ces jeunes zazous profitant d’une permissivité toute civilisée, de faire quelque chose pour leur pays, non mais des fois. Défini comme politiquement engagé, prônant une anarchie dionysiaque, Xander Cage glisse du statut de résistant à celui de nouvelle figure du système.

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