SYNOPSIS :
Etienne, dix-sept ans, se voit offrir
un caméscope par sa grand-mère. Le jeune homme
filme des morceaux de sa vie qui mettent en scène son
meilleur copain vers lequel il semble attiré, ses répétitions
de patinage artistique et son prof de géographie qu’il
épie secrètement… |
....................................................................
|
POINT DE VUE
|
 |
|
|
Le troisième
film du tandem Ducastel/Martineau (après Jeanne
et le garçon formidable et Drôle de Félix)
commence par un postulat esthétique relativement inédit :
ce qu’on voit (et rien d’autre) est enregistré par
l’objectif du jeune héros de dix-sept ans. Le parti
pris amuse, puis irrite quelque peu avant de devenir naturel
pour le spectateur.
Le principe réaliste exige que les comédiens
reproduisent les réactions de personnes qui n’ont pas
l’habitude d’être filmées en temps normal, aussi
la caméra est-elle omniprésente dans les conversations
des personnages. Cela signifie, entre autres, que lorsque
l’on franchit une certaine barrière de l’intime, on
est obligé de couper, une difficulté narrative
particulièrement coriace.
L’essentiel du film se trouve donc dans le hors champ, voire
même dans une autre dimension diégétique,
impossible à capturer visuellement. Cela a pour effet
de retranscrire l’idée du " non-dit "
avec une justesse incroyable. Ainsi les sentiments amoureux
du jeune homme pour son prof, qu’il espionne à travers
la ville, sont-ils beaucoup plus explicites exprimés
par ces images volées récurrentes, qu’ils ne
l’auraient été dans le cadre d’une mise en scène
classique.
 |
|
|
|
Mais il ne faut pas
non plus réduire Ma Vraie vie à Rouen
à un simple exercice de style. Les personnages sont
bien vivants et la sensation qu’on vient de partager un moment
avec eux est beaucoup plus présente que dans une fiction
traditionnelle. Un mélodrame classique montrerait
tout le hors champ qui nous préoccupe, mais serait
incapable de refléter l’état d’esprit des personnages
aussi intimement. Les scènes de contemplation, ou d’auto
contemplation, sont à ce titre les plus intéressantes :
les plans isolés où le jeune homme filme des
parties de son corps participent d’une visualisation de son
inconscient où il semble prendre connaissance de son
pouvoir de séduction physique, sans pouvoir l’exprimer
ou la partager avec un autre. Il le partage donc avec son
caméscope, un " autre " mystérieux
sur lequel il peut fixer tous ses désirs. La caméra
comme point de vue sur soi, comme rapport à l’intime,
à ce que l’on peut montrer, sont autant de thèmes
qui découlent de ces images.
A ce titre on peut regretter que le concept de voyeurisme
ne soit pas plus exploité. Après tout, il y
a bien quelque chose de l’appropriation de l’autre par l’image
dans la façon qu’a le jeune homme de filmer les garçons
qu’il désire alors qu’il ne peut l’exprimer verbalement.
Ce qu’on retiendra également, c’est le point de vue
sur l’homosexualité, neuf et sincère, en comparaison
de ce qui a déjà été montré
ailleurs.
|
 |
|
|
Il faut célébrer
l’audace des deux cinéastes qui continuent d’explorer
leur idée du cinéma de façon radicalement
différente, ne profitant pas de la petite notoriété
qu’ils peuvent acquérir au fil des films pour se réfugier
dans un système de production confortable et ronronnant
(à l’inverse de certains " jeunes talents "
qui finissent par céder à l’académisme).
Pour cela, et aussi parce que c’est un film très touchant,
avec des comédiens épatants, Ma Vraie vie
à Rouen mérite qu’on se laisse embarquer
derrière la caméra du jeune Etienne, un réalisateur
inédit et définitivement attachant !
 |
|
 |
|
Titre : Ma vraie vie à Rouen
Réalisateurs :
Olivier Ducastel, Jacques Martineau
Acteurs : Ariane
Ascaride, Jimmy Tavares, Jonathan Zaccaï,
Hélène Surgere, Lucas Bonnifait
Directeur de la photographie :
Matthieu Poirot-Delpech, Pierre Milon
Ingénieur du son :
Régis Muller
Costumier : Juliette
Chanaud
Maquilleur : Maïté
Alonso
Chef décorateur :
Juliette Chanaud
Chef monteur :
Sabine Mamou
Mixage : Jean-Pierre
Laforce
Production : Agat
Films & Cie
Producteur : Nicolas
Blanc
Distribution :
Rezo Films
Date de sortie : 26
Février 2003
Durée : 1h 42mn
Pays : France
Année :
2001
|
|
|