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Darkness (c) D.R. DARKNESS
de Jaume Balaguero
Par Romain LE VERN


SYNOPSIS : Il y a quelque chose dans cette maison, quelque chose d’ancien et de sombre qui demeure immobile, caché, silencieux. Terré dans l’obscurité depuis des années car c’est l’obscurité qui lui donne corps. Et elle seule peut l’aider à se matérialiser et à bouger. Cette chose attend ainsi depuis plus de quarante ans, depuis que quelqu’un l’a invoquée. Car cette maison abrite un terrible et cruel passé au secret abominable ; il est question de sept enfants, de gens sans visages… Une famille vient de s’installer dans cette maison. Une famille avec un petit garçon et un père instable, au bord de la crise de nerfs. Une cible parfaite. Au bon endroit et au bon moment. Et si rien n’était fortuit? Si tout avait été calculé depuis le début ? Comme dans un plan diabolique. La maladie du père, la maison des cercles, les enfants…

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ILS SONT LA, ILS ARRIVENT, ILS VONT NOUS TUER

  Darkness (c) D.R.
Quel est le point commun entre Dark Water, Darkness Falls et Darkness? Le mot «dark» et une propension dans chacun de ces films à faire peur avec le noir. Une peur qui remonte à l’enfance, qui ne date pas d’hier certes, mais de plus en plus à la mode grâce à un retour aux plaisirs simples et purement jouissifs du grand frisson sans second degré ni cynisme.  Jaume Balaguero n’est cependant pas un opportuniste : il ressasse ce thème depuis La Secte sans nom, son premier long-métrage, et s’inspire de ses peurs enfantines pour nourrir la substance de ses scripts : «J’imaginais des choses cachées dans le noir et qui n’apparaissent que lorsque j’éteignais la lumière. Des choses invisibles, horribles. Et même lorsque je rallumais la lampe de chevet, incapable de vaincre ma peur, l’obscurité persistante dans les coins de la pièce suffisait à me convaincre que ces choses vivaient, tapies sous mon lit ou dans mon placard. M’espionnant. »

Vus leurs parcours respectifs, on serait tenté de d’établir une analogie entre les cinéastes Alejandro Amenabar et Jaume Balaguero, qui se tournent de plus en plus vers Hollywood. À première vue, on pourrait penser que l’un suit l’autre, dans l’ombre. Mais réflexion faite, ces deux cinéastes n’appartiennent pas à la même école : Balaguero est plus à ranger du côté de la fantastic factory de Brian Yuzna, avec Paco Plaza et Stuart Gordon, tandis que les inspirations d’Amenabar se tournent plus clairement vers Hitchcock et Buñuel. Par ailleurs, ils ont des atmosphères particulières, propres et dissemblables. Peut-être avons-nous un penchant plus explicite pour le cinéma d’Alejandro Amenabar, qui non seulement a sorti plus de films, mais de surcroît s’essaie à différentes sortes de fantastiques : l’onirisme avec Ouvre les yeux/Abre los ojos, le malsain avec Tesis, le gothique avec Les Autres/The Others.

Darkness (c) D.R.
Avec sa première Secte sans nom/Los Sin nombre, on pouvait remarquer l’attirance du cinéaste pour le morbide, les ambiances poisseuses et les dénouements abrupts. Darkness, c’est La secte sans nom en nettement plus abouti, en bien plus convaincant et en moins gratuitement sadique. C’est davantage un film effrayant qui ne propose pas de résolutions toutes faites afin de ménager le maximum de surprises. Ainsi, il est quasiment impossible de deviner le dénouement de l’intrigue (étrange et surprenant), même si les figures imposées peuvent paraître grossières et déjà vues.

Comme pour son premier film, Balaguero semble avoir eu les coudées franches et la possibilité de remettre en scène ses obsessions. La mise en scène, reflétant la pagaille intérieure des personnages, tremble et se révèle ainsi d’une efficacité totale pour instiller le trouble et la peur. Elle met en valeur les nombreuses références qui parcourent le film, plus ou moins volontairement : le canevas (la folie d’un père qui jaillit au détriment de l’harmonie familiale), la mise en forme (on fragmente le récit par jour) et les manifestations fantastiques (les deux jumelles au bout d’un couloir) font immédiatement penser au Shining de Kubrick, mais la manière dont Balaguero filme évoque incidemment le travail de Robert Mulligan sur L’autre (72), chef-d’œuvre du genre fantastique, où là encore le noir n’a jamais été aussi lumineux.