SYNOPSIS :
Paul Smaïl,
un beur de trente ans, peine à trouver du travail malgré de
brillantes études supérieures. Pour survivre, il accepte des
petits boulots ingrats comme livreur de pizza ou gardien de
nuit dans un hôtel de passe à Pigalle. Il profite de ses longues
nuits d’attente pour rédiger un journal intime en espérant un
jour être publié, se révoltant contre les injustices qui l’entourent.
Un roman schizophrène transformé en
téléfilm beau mais vain
Jean-Pierre Sinapi avait déjà montré
avec Nationale 7 un certain talent dans la peinture de
relations complexes en milieu social difficile. Pour Vivre
me tue, il s’inspire du roman éponyme de Paul Smaïl qui
avait fait sensation, il y a six ans, lors de sa parution en
librairie. En effet, il donnait la parole à un fils d’immigré
et faisait un constat âpre et sans concession d’une réalité
quotidienne. Loin du discours excessif et lapidaire des rappeurs,
il tentait une prise de conscience de ce que beaucoup refusent
de voir, des injustices auxquelles sont confrontés encore aujourd’hui
les enfants de l’immigration. Avec son livre écrit à la première
personne dans un style virtuose, Paul Smaïl devient l’objet
d’un certain culte qu’il entretient, en ne dévoilant rien sur
son identité. Normal puisque après la publication de trois autres
ouvrages dont l’extraordinaire Ali le magnifique, on
apprend qu’il s’agit en fait d’un pseudonyme derrière lequel
se cache l’écrivain Jack-Alain Léger, personnage schizophrène
et radical de la littérature française, malmené par la critique
et rejeté par son milieu. L’auteur est un cas clinique de paranoïa
qui ne cesse de tirer à boulets rouges, parfois justement, sur
les institutions de toutes sortes.
C’est ce qui donne son relief à Vivre me tue, le livre
: alors que l’on croyait à la bonne foi d’un jeune beur écrivant
dans sa chambre de bonne un roman révolté, on s’aperçoit qu’il
s’agissait en réalité d’un écrivain bien français confirmé et
bientôt cinquantenaire. Avec ce recul, ce récit devient une
parabole sur la perception et les préjugés qui donne beaucoup
à réfléchir.
Dénué de cet aspect, le film en est lourdement
appauvri. La paranoïa de Smaïl / Léger n’apparaît pas du tout.
Seule la substance narrative, plutôt faible, est conservée.
Ajoutons à cela une réalisation d’inspiration télévisuelle et
il ne reste finalement qu’un film social de plus, assez réussi,
mais sans véritable panache. Malgré tout, Sinapi réussit à nous
faire croire aux situations et à tirer parfois vers une poésie
inespérée, secondé par des acteurs justes, en particulier Sami
Bouajila, toujours impeccable dans son emploi habituel et Sylvie
Testud surprenante et attachante. Jalil Lespert n’est pas non
plus en reste, endossant la carrure (métamorphose stupéfiante)
d’un culturiste homosexuel.
Dommage qu’on ne sente pas mieux le désespoir existentiel extrême
qui émanait du livre. De ce qui aurait pu être un pamphlet pour
l’intégration reste un film beau mais vain.
Titre : Vivre me tue D’après le livre :
Vivre me tue Ecrit par : Paul
Smaïl Réalisateurs :
Jean-Pierre Sinapi Scénaristes : Jean-Pierre
Sinapi, Daniel Tonachella Acteurs : Sami
Bouajila, Jalil Lespert, Sylvie Testud, Simon Bakinde,
Roger Ibanez Production : Cinétévé
Distribution, Centre National de la Cinématographie
(C.N.C.), Gimages Développement, Le
Studio Canal+, MTM Cinétévé, Pandora
Filmproduktion GmbH, WestDeutscher Rundfunk
(W.D.R.), Arte France Cinéma Distribution :
Cinétévé Distribution Productrice : Fabienne
Servan-Schreiber Sortie le : 18
Juin 2003 Pays : France,
Allemagne Année : 2002 Durée : 1h25