« Comme je le constate, les classes
sociales sont de plus en plus segmentées de nos jours pendant
que nous sommes de moins en moins capables de nous comprendre
les uns les autres. Cependant, l’idée de la trilogie n’est
en aucun cas de prétendre devenir une étude sociologique :
les films ne traitent pas des milieu aisés et des milieux
défavorisés ; ce sont simplement des films qui prennent
place parmi ces trois milieux séparés. Mes seules sources
pour créer une histoire sont la curiosité et la passion. »
Cette approche de la réalité à travers le médium cinématographique
explique ce qui fait la richesse du scénario d’Arven
(finalement récompensé à San Sebastian) : sa complexité.
Et pour incarner au mieux cette dernière
faite de sentiments contraires, c’est sur l’étude du personnage
de Christoffer qu’il faut se pencher. Personnage très riche,
Christoffer, héritier de cette entreprise familiale au pouvoir
si étouffant, l’est aussi de la tradition des personnages
de tragédie grecque à travers le devoir qu’il se doit d’accomplir
pour suivre un destin qu’il n’a pas voulu. La « curiosité »,
dont parlait Per Fly et qu’il a utilisé pour créer le personnage
de Christoffer, se révèle ici particulièrement recherchée.
Le réalisateur montre en effet un personnage nordique, fait
de retenue, mais qui n’empêche pas, malgré la froideur qu’il
semble témoigner à son entourage, d’être passionné dans ses
pensées et dans ses prises de décision. Le thème de la haute
bourgeoisie a toujours été un excellent moyen de mettre en
scène l’hypocrisie humaine, et ici, un peu à la manière de
Chabrol dans La Fleur du Mal (également présenté à
San Sebastian) qui osait un plan en forme de cage à oiseaux
pour filmer sa famille de bourgeois, c’est bien l’histoire
d’un homme prisonnier de son milieu, de sa famille, de son
devoir qui va perdre peu à peu ses repères personnels, tels
que sa vie privée avec sa femme ou son désir de tenir un restaurant
dans Stockholm, la ville des arts (où sa femme exerce son
métier d’actrice), la ville des espoirs, en somme celle de
la liberté.
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Arven, c’est aussi la peinture précise
de la famille avec la mère possessive, le beau-frère arriviste
et la sœur incomprise. Englué dans ce cadre familial qu’il
avait pourtant décidé de quitter le personnage de Christoffer
va connaître une descente aux Enfers, à l’image des plans
de son usine d’acier.
La machine infernale que représente cet
héritage est en marche et Per Fly va filmer la progressive
déchéance de son personnage qui vit de façon héroïque une
situation somme toute banale et c’est peut-être ce qui fait
aussi l’intérêt du film, puisque malgré son identité danoise,
il a su montrer avec pudeur les souffrances et rancœurs que
toute famille engendre et tente pourtant de cacher.
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Titre :
L’Héritage
Titre VO : Arven
Réalisation : Per
Fly
Interprétation : Ulrich
Thomsen, Lisa Werlinder, Ghita Norby, Lars Brygmann,
Karina Skands, Peter Steen, Ulf Pilgaard, Diana
Axelsen, Jesper Christensen, Dick Kayso.
Scénario : Per
Fly, Kim Leona, Mogens Rukov et Dorte Hogh
Chef-opérateur :
Harald Gunnard Paalgard
Production : Soren
Gam
Costumes : Stine
Gudmundsen-Holmgreen
Son: Mick Raaschou et
Henrik Langkilde
Assistant Photographie: Aslak
Lytthans
Coproduction : Jens
Amoldus
Producteur exécutif :
Peter Aalbaek Jensen
Musique : Halfdan
Giese
Photographe de plateau :
Per Arnesen
Son : DOLBY DIGITAL
Format : Panoramique
Pays : Danemark
Durée : 1h47
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