Le problème avec
Jude. Le putain de problème avec Law, c'est qu'on peut
s'y noyer. C'est aussi toute la charge lexicale hypra-superlative
qui pénètre son jeu, dans chacun de ses pores
; la moindre de ses embrasures. Dans ce périmètre
trashement romanesque, inondé par une crue crypto-gay
à sec, se fourrent d'évidentes intentions d'osmose
corporelle. De la déclaration d'amour publique juteuse
dont s'est fendu Didier Péron en mars dernier dans
"Libé" ("Jude Law, mon héros") à la juxtaposition
de prédicats quasiment anaux emballés dans un
papier à fleurs des plus lyriques et tendus par un
Stéphane Bouquet imbibé d'une fragrence supra
aphrodisiaque dans le numéro des "Cahiers" recensant
les acteurs/trices américains, Law semble faire sa
loi libidineuse. "Jude Law, mon éro, ma blanche d'écran
noir", éjacule grosso modo la prose chatertonnisée
des deux critiques. Dans cette copulation épistolaire,
véritable fringale rectale latente et confessée
("très bandant", érotise Bouquet avant
que d'oindre avec doigté ses intentions : "certains,
on les aime aussi pour le désir qu'ils provoquent"),
les deux auteurs enfouissent cependant sous un oreiller conjugal
éminemment virtuel la limpide rouerie avec laquelle
le beau Law inflige un coup de poignard dans le dos de ses
compositions. Outillé qu'il est d'un Castorama franchisé
version gueule outrageusement onctueuse ; customisé
du poil de l'orteil à l'épi de cheveu. Le vocable
animal qui accueille chacune de ses esquisses de prestations
suit comme une ombre chacune de ses performances malheureusement
incontinentes de fadeur et d'atonie. Jude, ce traître
de désirs, a beau dépenser ses tics d'acteur
en Europe (Le Talentueux M. Ripley), patrie de l'insouciance
et autres désinvoltures, il n'en paie pas moins son
monde en monnaie de singe. Démarche angélique.
Petite gueule d'Arpagon.
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S'agissant de cet Adonis
cultivant le minimum syndical dramaturgique, à deux
doigts de l'introduction en bourse cinématographique
de son sex-appeal - sa virilité contenue et sa garde-robes
magnifiée en guise de stock-options, il convient, étant
donné la cellule dorée de rhétorique
triquante dans laquelle certains s'évertuent à
l'écrouer, de couper tous ces ébats verbaux
avec une goutte de dramaturgescence. Jude Law fait fouraxer
son aptitude visiblement excitante, voire réjouissante,
de non-incarnation avec un désir fusionnel, une envie
charnelle. Or, quel est le plus important : le corps sculptural
délicieusement suranné de Johnny Wesmuler ou
sa façon inégalée, ce mutisme paroxystique
quasi-unique, de faire couler ce sang centripète dans
les veines de son personnage sanctifié de Tarzan ?
Les deux éléments, bien sûr, qui se diluent
l'un dans l'autre. Le système des vases communicants.
La maîtrise du ricochet. L'interprète dépourvu
de toute voracité de "La sagesse des crocodiles" se
contente, saloperie de paresse en l'occurrence, de poser habité
par quelque chose comme la démagnétisation.
L'auto-censure. Le suicide. N'est pas Molière qui veut.
Faible éphèbe à la fois, en somme. Malgré
son patronyme outrancier de cinéma, bien qu'usufruitier
d'une nonchalance classieuse volée à la tir
chez les plus grands et qui nous donne envie de nous accrocher
aux branches pubiennes de son impuissance à s'approprier
les masques que les réalisateurs lui confectionnent,
Jude Law n'est qu'aqueux. Et à cul Ce sont pour l'instant
ses deux seuls talents. A regret. Il noie le poisson de la
quintessence normalement insufflée à chaque
comédien dans son physique effectivement aimanté.
Et nous, pauvres petits bipèdes sexués, de boire
la tasse.
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2002
Marlowe de John Maybury
2002 The Road to
Perdition de Sam Mendes
2001 A.I. Intelligence
Artificielle de Steven Spielberg
2001 Stalingrad /
Enemy at the Gates de Jean-Jacques Annaud
2000 Gangsters, Sex
Et Karaoke de Dominic Anciano & Ray Burdis
1999 Le Talentueux
Mr Ripley d'Anthony Minghella
1999 EXistenZ
de David Cronenberg
1999 Le Cygne du
Destin de Charlie Peters
1998 La Sagesse Des
Crocodiles de Po-Chih Leong
1998 Music from Another
Room de Charlie Peters
1998 Final Cut
de Dominic Anciano & Ray Burdis
1997 Wilde de
Brian Gilbert
1997 Bienvenue à
Gattaca d'Andrew Niccol
1997 Bent de
Sean Mathias
1997 Oscar Wilde
de Brian Gilbert
1997 Midnight in
the Garden of Good and Evil de Clint Eastwood
1996 I Love You,
I Love You Not de Billy Hopkins
1994 Shopping de
Paul Anderson
1992 The Crane
du British Film Institute (cm)
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