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Objectif Cinéma : Pouvez-vous nous parler des problèmes rencontrés avec la censure, sur le Viol du Vampire notamment ?

Jean Rollin : Sur Le Viol, on m'a obligé à couper une séquence. Mais le film était en salles en mai (1968 ndlr) ; à Paris, c’était la Révolution, alors je n’ai pas coupé la scène…C’était une scène de messe noire, et il y avait un prêtre…Quand ils ont vu ça, ils ont décidé de couper !

Mais il y avait des manières de contourner la censure. Toujours pour Le Viol, au début de la seconde partie, le couple se réveille sur la plage et ils sont nus ; il n’y avait rien d’érotique, ils étaient juste nus. Mais la nudité intégrale était à l’époque strictement interdite ; alors qu’avons-nous fait ? Nous ne pouvions pas couper la scène, importante pour l’histoire, et nous ne pouvions pas la laisser en l’état. Alors, et cela nous a d’ailleurs coûté pas mal d’argent, nous avons mis le générique sur la scène, et le titre " pile " sur le sexe des personnages…

L’autre confrontation, ce fut Les Raisins de la Mort qui faillit être classé X, à cause de sa " grande violence " ; il y eut ballottage, mais nous avons finalement gagné.



  Foltermühle (c) D.R.

Objectif Cinéma : Vous avez co-réalisé dans les années 70 de nombreux films X avec Jean Pierre Bouyxoux. Quels sont exactement vos liens avec lui et Maurice Lemaître ?

Jean Rollin : Bouyxoux, comme Lemaître, est l’un de mes meilleurs amis, depuis toujours. Quand j’ai commencé à tourner des films, Bouyxoux était avec moi, faisant l’assistant, écrivant des scénarios avec moi…Nous étions très proches. Quant à Lemaître, j’ai trouvé un jour amusant de le faire jouer, alors qu’il n’est absolument pas acteur, et qu’il a une diction totalement fausse ! On a dit alors qu’il ne savait pas jouer, qu’il jouait mal… C’est très amusant d’avoir un personnage qui joue comme ça, car il ne joue pas en fait : il est exactement comme ça dans la vie !


Objectif Cinéma
 : Quelle était la part du commercial et de l’expérimentation dans le fait de tourner des films X ?

Jean Rollin : C’était commercial, car nous n’avions ni le temps ni l’argent nécessaire pour faire quelque chose d’intéressant : ces films étaient tournés en deux jours. J’ai essayé une fois de mêler le fantastique et le X, dans un film qui s’appelle Fantasmes, mais ce fut un échec : le public ne venait que pour les séquences porno, j’avais travaillé pour rien.


Jean Rollin sur Les Raisins de la mort (c) D.R.

Objectif Cinéma : Comment trouvez-vous vos actrices, notamment Brigitte Lahaie ? (4)

Jean Rollin : Je l’ai rencontré sur le tournage d’un film X que je réalisais, et j’ai trouvé qu’elle avait " quelque chose " que les autres actrices du porno n’avaient pas. Je lui ai donc dit : " un jour, j’aimerais te faire jouer un petit rôle dans un film fantastique ". Elle ne m’a pas cru, mais un ou deux ans après, j’ai eu l’opportunité de tourner Les Raisins de la Mort. Je l’ai alors appelé pour lui proposer un rôle : elle était surprise ! Elle joua donc dans le film et y prit beaucoup de plaisir. Elle découvrit sur ce film le plaisir de jouer ; depuis, elle a beaucoup travaillé, et elle est devenu une actrice. Mais c’est sur ce film qu’elle a ressenti pour la première fois à quel point elle pouvait prendre du plaisir à dire un texte, à jouer quelque chose, et pas seulement des scènes de sexe ; c'était aussi un plaisir pour elle, mais d’un autre type.


Objectif Cinéma : Vous rattachez-vous à une " école française " du fantastique, qui inclurerait Cocteau ou Georges Franju ?

Jean Rollin : Je peux dire que Georges Franju est mon maître, je me sens très proche de lui. Des films comme Judex, et même Pleins Feux sur l’Assassin, qui est pourtant un petit film commercial, sont pour moi très intéressants. Ce décor de château notamment…