La génération de Platform
a vécu dans une atmosphère d’enfermement, avec
un pouvoir extrêmement autocratique, très autoritaire.
Ensuite, les réformes interviennent et ces jeunes veulent
apprendre la liberté, et ce qui les anime intérieurement,
c’est de rechercher les moyens par lesquels ils vont pouvoir
vivre avec cette nouvelle liberté. J’ai fait le choix,
au niveau de la forme cinématographique, de filmer
l’errance des jeunes pour parler de cette quête. Par
contre, dans Plaisirs Inconnus, les jeunes font partie
de la société de consommation. La Chine a toujours
été dirigée par des gens d’un certain
âge, les jeunes ont toujours constitué une partie
de la société fragilisée, et faible,
la société n’a jamais confiance en eux. Moi,
je me considère comme faisant encore partie de cette
jeunesse, et je voulais observer la société
à travers les faibles.
Objectif Cinéma
: Votre film repose sur l’alternance
entre les scènes d’action et d’inaction, avec de
longs plans fixes associés à de brusques ruptures
de ton filmées en caméra portée... Jia Zhang-Ke
: J’aime effectivement les plans séquence et les
plans fixes, j’aime aussi beaucoup la répétition
des mouvements, les moments insérés dans l’action,
le côté mécanique de certains mouvements,
ceci pour aider à créer une atmosphère.
Ainsi j’arrive à révéler le désespoir
de ces jeunes, un désespoir qu’on ne peut pas voir
au premier abord et qui ne s’exprime pas facilement. A partir
du moment où mon intérêt est focalisé,
le récit linéaire n’est pas intéressant.
Objectif Cinéma
:Xiao Wu, Artisan Pickpocket
(1997) était tourné en 16mm, Platform
(2000) en 35mm alors que Plaisirs Inconnus est filmé
en DV, pourquoi ces choix ?
Jia Zhang-Ke :
A chaque fois les modes de tournage s’imposaient à
moi, le choix était clair pour chacun d’entre eux…
Pour Plaisirs Inconnus, le DV m’a aidé à
montrer cette errance dont nous parlions, l’errance des
jeunes, le DV, avec ses couleurs, reflétait la société
de consommation dans laquelle ces jeunes vivent. J’aimais
beaucoup la liberté que permettait le DV, je pouvais
choisir un espace, y errer librement, et saisir, au moment
où ils survenaient, les moments les plus théâtraux.
Objectif Cinéma
: Pouvez-nous nous parler de
l’influence du son et de la musique dans vos films ?
Dans Plaisirs Inconnus, la musique est particulièrement
présente… Il y a le personnage de Qiao Qiao, la chanteuse,
puis on vous voit vous mettre vous-même en scène,
chanter La Traviata… Comment travaillez-vous avec Yang
Zhang, votre ingénieur du son ?
Jia Zhang-Ke
: Yang Zhang et moi nous travaillons depuis longtemps ensemble,
il est lui-même membre d’un groupe de rock, nous sommes
toujours sur la même longueur d’ondes quand nous travaillons.
Nous sommes tous les deux très intéressés
par la façon de traiter les sons d’ambiance, tout ce
qui pourrait être évacué par d’autres
réalisateurs comment étant de la nuisance sonore.
2001Plaisirs
inconnus / Ren xiao yao avec Zhao Wei Wei, Wu
Qiong 2000Platform / Zhantai avec Wang Hong-wei, Tao
Zhao 1997Xiao Wu artisan pickpocket avec Wang Hong
Wei