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  Star Wars II - L'Attaque des clones (c) D.R.
Lucas, justement. Il demeure le grand perdant (finances mises à part, merci pour lui) dans cette tentative d’approfondissement de ce qui ne demandait pas à l’être. Bien mal lui en a pris de ne pas tirer parti des leçons reçues de façon éblouissante lors de la précédente trilogie. Ecrits principalement par Lucas, et réalisés soit de son propre chef, soit par un yes-man trop jeune, Un Nouvel espoir et Le Retour du jedi devenaient finalement tous les deux narrativement mous, et comportaient pas mal de défauts imputables au producteur, et au manque de personnalité des personnes qui l’entouraient. A l’inverse, réalisé par un vieux brisquard responsable d’un des plus solides James Bond (Irvin Kirschner), et entièrement écrit par cet ex-génie qu’est Lawrence Kasdan (Lucas n’étant crédité que pour l’histoire originale), L’Empire contre-attaque se révélait comme un pur chef d’œuvre incroyablement profond et tenu de bout en bout.

Las, Lucas revient à la mise en scène, et s’octroie aujourd’hui les services de l’un des créateurs du déjà oublié Roi Scorpion pour l’écriture du script. C’est le premier point sur lequel le bât blesse : plombé par des passages inutiles bien souvent prévisibles, et des rebondissements trop longs, le scénario rarement linéaire part dans tous les sens, et se perd dans des histoires parallèles peu maîtrisées. Faisant référence ici ou là à des scènes de l’autre trilogie, l’histoire introduit des personnages pour mieux les détruire ensuite, les vidant illico de toute substance, de tout passé, de tout intérêt. Voir par exemple le sort peu enviable réservé à Jango Fett, père de Boba Fett, étonnamment l’un des personnages préférés du public. Comme son fils dans Le Retour du jedi, le chasseur de prime meurt d’une façon ridicule, rapide, et risible. Le chagrin éprouvé par le jeune enfant, témoin de la mort du père, ne change rien : le personnage n’a pas eu le temps d’exister, trop rapidement défait par un scénariste démiurge et inconscient secondé lui-même par un metteur en scène incapable, accumulant paradoxalement les erreurs d’un premier film.


Star Wars II - L'Attaque des clones (c) D.R.

La soi-disante noirceur du propos principal du film (le destin sombre d’Anakin) et la profondeur que Lucas cherche à donner à son histoire (autour notamment de la figure absente du père) sont malheureusement perturbées par la tentation du cinéaste d’introniser ses personnages en tant qu’outils faisant évoluer non pas l’intrigue, mais l’humeur du spectateur. Ainsi, Obi Wan (pauvre Ewan McGreggor) devient dans cet épisode une sorte de sidekick comique, faisant du coude à ce spectateur après chaque blague, commentant, tels les petits vieux dans les albums d’Astérix, les agissements de son jeune padawan. Triste.

Estimant que l’on est jamais aussi bien servi que par soi même, et qu’aucun autre que lui ne sauraient retranscrire avec fidélité à l’écran ses idées de génie, Lucas fait une erreur de plus en décidant de réaliser lui-même cet épisode 2. Mis en confiance par des effets spéciaux enfin au point (ce que ceux de La Menace fantôme n’étaient pas), Lucas en rajoute dans le trop plein, et étouffe une fois de plus ses personnages au milieu de décors certes grandioses, mais pour la plupart trop froids et dénués de toute vie. N’existant plus au milieu des nombreux blue screens devant lesquels ils doivent jouer, les acteurs n’ont d’autre choix que celui de réciter leur texte, de façon relativement moins mécanique, admettons-le, que dans l’épisode 1. Que George Lucas le veuille ou non, ses décors de synthèse auront toujours moins de prestance que ceux de la lune Endor, dans lesquels se terraient les gentils Ewoks, ou de Dagobah, dernier repère du maître Jedi Yoda. Les décors les plus réussis sont ainsi ceux qui se font le plus discrets : Naboo et sa cité vénicienne, ses prairies… Pourtant, le véritable problème du film se situe ailleurs. Dans cette propension à chercher systématiquement à tuer dans l’œuf n’importe quelle idée – bonne ou mauvaise. Un exemple parmi tant d’autres, le duel final entre Yoda et Dooku, matérialisation sur grand écran d’un rêve de fan, commence de façon amusante, pour se terminer quelque trente secondes plus tard, de façon laborieuse. Ou comment ne pas satisfaire du tout à l’attente du public, qui espère depuis deux décennies un duel anthologique, et n’a pour seule récompense qu’un combat mou et beaucoup trop court. Tout le film est à cette image : naviguant entre bonnes idées, et fausses innovations de mise en scène. Terriblement dommage pour une œuvre de ce genre.