SYNOPSIS :
Koumbi est une cité dominée par un empereur, maître
de l’univers. Elle est frappée par la misère.
Pour lui redonner prospérité, les prêtres
de l’empereur doivent pratiquer un sacrifice humain habituel
auquel le peuple ne croit plus. Sia est désignée
pour le sacrifice. Mais elle est fiancée à Mamadi,
un vaillant lieutenant de l’armée. Celui-ci apprenant
la décision se rebelle et parvient à éviter
le sacrifice de sa belle.
Le pouvoir change de main, mais le mensonge
qui le régit demeure. Sia en a conscience, elle qui a
été violée par les prêtres, s’est
attachée au discours de Kerfa, un vieux fou à
la parole sage mais subversive.
Contre toute attente, au lieu de se coiffer de la couronne d’impératrice
que lui offre son fiancé nouveau maître de la ville,
Sia prendra la route, comme Kerfa l’a fait avant elle, afin
de faire prospérer une parole de paix et de justice.
Parole qui passe par une sorte d’anathème sur la ville
et ses habitants qui ne parviennent pas à tirer les leçons
de l’histoire.. |
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UNE FABLE A PORTEE UNIVERSELLE
C’est dans les vieilles
marmites qu’on fait les meilleures sauces. Le réalisateur
burkinabé Dani Kouyaté nous le prouve avec son
deuxième long-métrage, Sia, Le Rêve
du python, une fable humaniste basée sur une légende
soninké datant du VIIe siècle.
Il nous offre une adaptation
intelligente du mythe fondateur du Dieu Serpent qui, selon
la croyance ancestrale, recevait en tribut une des plus belles
jeunes filles de la noblesse. En échange, l’empire
du Wagadu, considéré comme le plus ancien royaume
noir connu, bénéficiait d’une prospérité
basée sur le commerce de l’or.
Mais un jour, une belle
sacrifiée refusant son sort tragique a mis fin à
ce sanglant compromis. L’histoire raconte que son fiancé
s’est aventuré dans l’antre du dieu serpent et l’a
tué. Avant de mourir, celui-ci maudit le peuple soninké
dont la domination s’étendait du Sénégal
au Niger. Condamné à la dissolution et à
l’exil, le royaume a disparu – l’empire mandingue naîtra
de ses cendres - mais la mémoire soninké a été
préservée grâce à une tradition
orale très riche qui a survécu jusqu’à
aujourd’hui.
L’adaptation libre de Kouyaté
est inspirée d’une pièce de théâtre
de l’auteur mauritanien Moussa Diagana aux tonalités
féministes, qui a d’ailleurs été touchée
par la censure en Afrique sub-saharienne. Le film incite à
rester vigilant face à l’amnésie collective
et au mensonge trop souvent accepté pour accéder
au pouvoir, conserver ses privilèges, ou tout simplement
éviter de perdre la face. Cette réflexion contemporaine
sur le pouvoir emprunte volontiers au répertoire tragique.
D’ailleurs, le courage de l’héroïne soninké
Sia (incarnée par la magnifique Fatouma Diawara) n’est
pas sans rappeler celui de l’Antigone de Sophocle ou
de l’Iphigénie d’Euripide, oeuvres maîtresses
de la culture occidentale.
Le cinéaste a volontairement
intégré des éléments de sa culture
burkinabé, n’en déplaise aux puristes, pour
donner au film une portée plus large. La parabole est
particulièrement évidente dans la dernière
scène du film :
Devenu empereur après un coup d’Etat, le fiancé
de Sia, Mamadi (Ibrahim Baba Cissé), la répudie
parce qu’elle menace de révéler le terrible
secret du serpent, qui menacerait son pouvoir.
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