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ARRETE-MOI SI TU PEUX !
de Steven Spielberg
Par Magali HAMARD


SYNOPSIS : New York, les années soixante. Rien ne va plus pour Frank William Abagnale. Jr depuis que sa mère, Paula, a quitté son père, harcelé par le fisc, pour les beaux yeux du président du Rotary club. Au moment du divorce, l’adolescent, à peine âgé de seize ans, préfère prendre la fuite plutôt que de choisir entre ses parents. Sans un sous en poche, il s’improvise faussaire et court le monde pendant près de cinq ans. Il s’invente pilote de ligne à la Pan Am, médecin ou avocat et en profite pour extorquer plus de 2,5 millions de dollars à travers les Etats-Unis et dans vingt-six pays. Rien ne semble en mesure de l’arrêter sauf … la pugnacité de l’austère Carl Hanratty, un agent du FBI. S’installe alors un jeu du chat et de la souris où Hanratty deviendra au fil du temps l’unique confident d’Abagnale.

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COURS, FRANK, COURS

 

La cavale de Frank Abagnale jr. aurait pu naître du cerveau d’un scénariste hollywoodien. Oui, mais voilà, aussi incroyable que cela puisse paraître, ses frasques n’ont rien de fictif. Sans cette authenticité, Leonardo Dicaprio affirme d’ailleurs qu’il n’aurait probablement pas accepté le rôle d’Abagnale : " le public n’y aurait jamais cru ". Son histoire abracadabrantesque et non dénuée d’ironie (désormais, Abagnale monnaye très cher ses talents auprès des banques qu’il escroquait) avait donc tous les atouts pour séduire l’Entertainer numéro un d’Hollywood. Ce destin incroyable permet à Spielberg de nous offrir une bulle de champagne salvatrice, drôle et émouvante, après la noirceur de Minority Report. Un de ces plaisirs de cinéma qu’il ne s’octroie qu’en de rares occasions, échaudé sans doute par le bide du corrosif 1941. Si Spielberg n’est pas familier de la mécanique du genre, il en maîtrise pourtant ici parfaitement les règles. Ainsi, sa mise en scène très sixties (zooms rapides, contre-plongées et ralentis), participe efficacement aux nombreux effets comiques. A l’image de la vie trépidante d’Abagnale, le récit, rapide, ne souffre d’aucun temps mort. Outre des répliques savoureuses (les métaphores paternelles, tout un poème), le film tire sa force comique grâce à des scènes d’escroqueries, où souvent les victimes tendent le bâton pour se faire battre, qui atteignent des sommets de fantaisie. Un côté ludique renforcé par le clinquant des Sixties.

Visiblement, Spielberg a pris un réel plaisir à faire revivre cette décennie de tous les possibles, celle de sa propre enfance. Tout y est : les Cadillac rutilantes et les choucroutes capillaires estampillées époque, le générique du début très Saul Bass (l’ombre d’Hitchcock plane de temps à autre), la musique réjouissante, aux accents jazzy, de John Williams qui pour une fois n’a pas convoqué la cavalerie, la lumière de Janusz Kaminski (selon Spielberg : " c’est la lumière de Dieu ") …Face à ses plaisirs orgiaques, l’œil est tout émoustillé, les zygomatiques au travail et les oreilles sous le charme. Bref, le film frise le " sans fautes ".

Fascinés par tant d’audace, on prend vite fait et cause pour ce garçon débrouillard, séduisant sans malice et finalement sympathique (le jeu " enfantin " de Leonardo Dicaprio y est pour beaucoup). Mais Spielberg, habilement, nous le dit d’entrée : les " bêtises ", que Frank enchaînent presque malgré lui, le mèneront à sa perte, dans une prison sordide du sud de la France. " Je ne pense pas avoir tué le suspense " explique Spielberg  " Frank ne pouvait échapper à son destin. Au montage, il m’a donc paru intéressant de construire une grande partie du film sur un flash-back, une technique que j’utilise peu, pour insister sur les relations de Frank avec son père, pour la connotation émotionnelle ".