Catherine (Fanny Ardant) se demande
comment faire pour que son couple conserve un équilibre et
jusqu’où elle doit aller par amour, pour résister à l’érosion
qui guette son couple. Elle choisit une alternative radicale
qui consiste à aller voir une prostituée. Le sexe est un thème
qui est ici abordé oralement au travers de discussions entre
les deux femmes, l’une écoutant ce que l’autre lui raconte.
C’est un parti pris judicieux qui fait jouer l’imagination
du spectateur, au même titre que celle de son personnage principal,
témoin des ébats de son mari uniquement par procuration. Dans
ce rapport à la fois charnel et manipulateur, Fontaine s’ingénie
à démonter le mécanisme de la possession, autopsie le charivari
intérieur de deux femmes, toutes les deux à la recherche de
ce qui les font jouir intérieurement, qui se manipulent...
et enregistre la quintessence du désir: l’expectative de l’une
et les sentiments refoulés de l’autre.
Au gré des conversions et des rencontres répétées, se mêlent
les fantasmes, la fascination et l’interchangeabilité des
caractères. C’est une quête identitaire et sexuelle : toutes
les deux changent de vie, fusionnent et transforment leur
existence morose. Et si finalement cette femme et cette maîtresse
ne faisaient qu’une seule et même personne ? Jusqu’où est-on
prêt à se perdre par amour ?
Comme à son habitude, le don d’Anne
Fontaine est de faire naître l’émotion dans les moindres détails,
même les plus anodins. On se souvient par exemple dans le
formidable Augustin, roi du kung-fu de l’incapacité
du personnage de Maggie Cheung à déclarer son amour à Augustin
parce que, étrangère, elle ne possédait pas les mots adéquats
pour lui dire ce qu’elle ressentait. Egalement, dans Comment
j’ai tué mon père, on s’évoque la tristesse du personnage
de Natacha Régnier qui découvre au cours du film qu’elle n’est
pas stérile et que son mari lui avait menti. Nathalie
est un film rempli d’instants furtifs du même genre, reposant
uniquement sur un mode elliptique et obéissant à une mécanique
remarquablement subtile.
L’ensemble fonctionne si bien qu’on regrette toutefois qu’une
pirouette finale trop attendue vienne remettre en question
la bonne tenue de l’ensemble. Mais cette révélation est une
déception relative : elle permet au personnage d’Emmanuelle
Béart de bénéficier d’un soupçon d’ambiguïté et de vénénosité
supplémentaires. Bête sexuelle, ange noir, elle fait partie
des personnages perturbateurs comme Fontaine aime à les écrire
: sorte d’équivalent de Stanislas Mehrar dans Nettoyage
à Sec et de Michel Bouquet dans Comment j’ai tué mon
père : des personnages complexes, fantasmés, qui viennent
secouer et parasiter le quotidien morose et faussement stable
de personnages en contradiction avec eux-mêmes.
Titre : Nathalie... Réalisateur : Anne Fontaine Acteurs : Emmanuelle
Béart, Fanny Ardant, Gérard Depardieu, Vladimir
Yordanoff Scénario : Anne Fontaine,
Jacques Fieschi avec la collaboration de François-Olivier
Rousseau d'après un scénario de Philippe Blasband Photo : Jean-Marc Fabre Musique : Michael Nyman Production : Les Films
Alain Sarde Distribution : Mars
Distribution Sortie le : 07 Janvier
2004 Durée : 1h 42mn Pays : France Année : 2003