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Dans Confidences trop intimes,
ce qui marque c'est l'idée de départ. L'erreur d'appréciation
spatiale d'une jeune femme, qui la conduit à se tromper
de porte, à sonner chez un conseiller fiscal et non chez
le psychologue avec lequel elle avait pris rendez-vous.
Les secrets intimes livrés à cet homme, le silence de ce
conseiller fiscal sur son véritable métier, le jeu quelque
peu malsain qui s'installe entre les deux personnages. L'histoire
est lancée de manière idéale. Il est peut-être inutile de
le répéter, mais un bon début de film s'annonce dès le premier
plan, dès le choix des éléments filmés pour y inclure le
générique. Et, pour Confidences trop intimes, l'image
d'une surface noire et granuleuse qui s'avère représenter
le mur du couloir où va se dérouler la mauvaise prise de
direction de l'héroïne remplit ce rôle avec bonheur.
Les prémices du film sont d'autant plus réussies qu'ils
reposent sur un acteur, Fabrice Luchini, et une actrice,
Sandrine Bonnaire, situés bien au-dessus de la moyenne cinématographique
française. Des deux, Sandrine Bonnaire est la plus à l'aise.
Jouant à la perfection l'innocence perverse - comme avait
déjà pu le montrer La Cérémonie de Claude Chabrol
-, elle excelle dans un rôle vaste, qui lui laisse une large
part d'expérimentation. Il est notamment fascinant de voir
comment Sandrine Bonnaire se transforme au cours du récit.
Sorte de chenille timorée, complexée, presque laide en tout
début de film, elle devient papillon les minutes passant,
un papillon sexy, charmeur, tout en sensualité. Elle fait
penser à ces femmes timides qui se révèlent les pires mante-religieuses
après un court round d'observation. Qu'on se le dise, Sandrine
Bonnaire ne sera pas loin du César de la meilleure actrice
l'année prochaine.
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Son compère, Fabrice Luchini, réalise
lui aussi une prestation de haute tenue, quoique plus contrastée.
Quand l'acteur joue l'étonné, il en fait trop. Les yeux
ronds, la bouche en cœur, les sourcils haussés, son attitude
tient clairement du registre comique. Or, une telle attitude
dénote avec le climat général de l'histoire. Sombre, élégant,
classique, le film de Patrice Leconte traite de l'intériorité,
des sentiments enfouis, des secrets maintenus immergés.
Les quelques prestations drolatiques de Luchini-Faber sortent
donc du contexte et sonnent faux. À l'inverse, dans d'autres
scènes - notamment celles où il se retrouve seul dans son
bureau -, celui que l’on connaît pour sa faconde et son
exubérance trouve dans la retenue une justesse remarquable,
pas forcément inattendue, puisque au théâtre - dans Knock
en particulier - il avait déjà ce même visage morne, dur,
triste, mais quand même surprenante dans son intensité.
Elle offre en tout cas pour l'un des acteurs français les
plus charismatiques de notre temps la possibilité de fouiller
d'autres registres que ceux dans lesquels on l'a cantonné
jusqu'à présent au cinéma. Avec le rôle de Faber, Fabrice
Lucchini peut clairement prétendre à des personnages peut-être
moins dans la parole et la dégustation des mots, et plus
dans les silences et le langage du regard.