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New Rose Hotel (c) D.R. NEW ROSE HOTEL
d’Abel Ferrara
Par Héloïse FEAU


BLACK OUT

Le film d’Abel Ferrara, New Rose Hotel, peut être envisagé dans une progression logique par rapport à son travail précédent, et plus particulièrement au film The Black Out. Le rapprochement entre ces deux films s’établit à plusieurs niveaux. Cependant, la spécificité de New Rose Hotel sera dans un premier temps établie, puis le recoupement avec The Black Out, dès lors plus approprié. Le schéma tente de récapituler la façon dont progresse New Rose Hotel, pour arriver à la comparaison avec The Black Out.

New Rose Hotel se présente comme un film sur l’identité. Elle tourne autour de trois personnages : Hirsoshi (par l’intermédiaire de l’ADN), Sandii, et X. Le problème de l’identité est ancré dans le film, aussi bien que largement déployé. Comme l’est l’ADN dans le corps humain.

  Abel Ferrara (c) D.R.

Ce code présente le passionnant paradoxe d’être à la fois unique, car caractérisant chacun des êtres vivants, et de se répéter exactement et à l’infini à l’intérieur des cellules d’un même corps. Aucune dérogation à cette règle n’est possible. Sauf si la main de l’homme vient semer la panique : et dans New Rose Hotel, c’est bien par l’introduction humaine d’un virus dans la constitution de l’ADN que périront Hiroshi et ses confrères.

Ces propriétés étonnantes de l’ADN vont se retrouver tout au long du film. Cet acide et ses métaphores sont au centre de New Rose Hotel, puisque Ferrara incorpore les caractéristiques de l’ADN à ses propres personnages. Le relais démarre avec Hiroshi, pour commencer. Car c’est lui qui se trouve à l’origine du deal que passe Fox, X et Sandii. Même si on ne le voit jamais, sauf en vidéo, c’est contre lui que se met en place la machination. C’est également lui qui est susceptible de jouer sur l’identité humaine, grâce à son synthétiseur d’ADN et à sa carte à puce. Il " règne " donc en silence.

Mais la première à manifester des troubles de l’identité est Sandii. Elle doit changer d’identité pour séduire Hiroshi. Encore faudrait-il qu’elle en ait une. Plusieurs éléments installent en effet le doute. Ainsi, lorsque l’on voit pour la première fois le tatouage angélique sur le ventre de Sandii, rien ne nous permet d’affirmer que cet abdomen soit bien le sien. Ferrara brouille volontairement les pistes et la limite des séquences, et on se demande alors à qui est ce corps. A personne ? Ou à tout le monde ?

New Rose Hotel (c) D.R.

Le fait de savoir qu’il est véritablement à Sandii renvoie directement à ces questions. Le corps de Sandii n’appartient-il qu’à X, ou bien le partage-t-elle avec tous les autres hommes qu’elle séduit ? Sandii trouve-t-elle une identité dans sa relation avec X, ou n’est-elle présente que grâce à son corps ? Ce corps tatoué, donc facilement identifiable, mais pourtant si anonyme.

Sandii s’embrouille quant à la nationalité de son père. Elle dit à X qu’il est italien, puis français, qu’il travaillait pour Maas… Si sa vie actuelle n’est pas claire, ses origines non plus. Sandii doit jouer aussi, changer d’identité, faire semblant de séduire Fox et X, qui se prennent eux aussi tour à tour pour quelqu’un d’autre, en l’occurrence Hiroshi. Elle doit les séduire comme elle séduirait le Japonais. Sandii répète. Elle répète devant eux, s’entraîne à ce qu’il faut dire, à ce qu’il faut faire. Mais ces préparatifs ne serviront finalement qu’à mieux séduire X. Car Sandii duplique. Elle répète exactement. La demande en mariage devient alors hypocrite, l’envie de partir également. Et ce, tant pour Hiroshi, à qui on suppose qu’elle a effectivement demandé, que pour X, à qui on la voit demander. Tout cela est étalé et différé dans le temps : d’abord Hiroshi, puis X, et enfin le spectateur. Le spectateur, car en attendant de voir les scènes entre Sandii et le Japonais, qu’il ne verra d’ailleurs jamais, il s’imagine que Sandii est malhonnête avec Hiroshi, et sincère envers X, jusqu’à la fin…