Le
manque guide et nourrit notre désir, il forme une illusion
qui nous suit comme notre double, comme une ombre, et la santé
d’un acteur est assurée par l’équilibre entre le désir et
le manque. Aussi les illusions de ces quatre femmes sont-elles
abîmées par leur vie privée que la magie de l’art ne peut
pas complètement sauver. La première sombre dans l’alcoolisme,
la seconde s’enfuit et fait sauter la maison que les producteurs
lui ont prêtée, la troisième finit lobotomisée, et la quatrième
perd son mari avec qui elle avait fondé une relation sincère
mais usée par le temps consacré aux tournages.
Parmi ces quatre femmes, seule la dernière
continuera son métier en gardant la tête froide et haute,
alors que la Divine ne croira plus en Dieu ni en quoi que
ce soit, et que Daisy Clover préférera changer cette vie qui
n’en est plus une. Frances, elle, finira dépossédée d’elle-même.
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Cependant, des points communs réunissent
certains de ces films, comme si ces quatre femmes étaient
solidaires les unes des autres dans leur malheur, au-delà
du temps et de la fiction. Par exemple, dans La Divine,
l’actrice se dispute avec sa mère en lui crachant au visage
que Dieu n’existe pas... Et Frances commence avec une
séquence de provocation : jeune adolescente, la future
actrice réfute l’existence de Dieu devant une foule de croyants,
durant la messe. Coïncidence corroborée par elle-même :
Kim Stanley, la « Divine », joue la mère de Jessica
Lange dans Frances. Aussi, dans Inside Daisy Clover
et A star is born, c’est le même désir de chanter la
joie qui réunit les deux actrices, à douze ans d’intervalle.
Chacune à leur manière, elles luttent, pour aimer et vivre.
Et le but essentiel est ici décliné selon ces quatre destins :
aimer la vie et vivre l’amour, qu’on soit riche ou pauvre,
célèbre ou inconnu. Cet essentiel est invisible, et les images
du cinéma n’en sont que l’ombre, une ombre qui peut à la fois
éclairer, ou aveugler.
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