SYNOPSIS : William
Harford et sa femme Alice mènent la vie banale d'un jeune
couple new-yorkais... Aussi, lorsque Alice révèle
à son mari ses fantasmes adultères, William, dévoré
par cette troublante confession, cède à la jalousie
et au jeu de la tentation. Il entame alors un périple
nocturne où ses obsessions le mènent en des lieux
étranges et mystérieux... |
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EN QUÊTE D'IDENTITE
Pour mettre en scène
l'une des thématiques de son film - l'identité
- Kubrick oblige son héros, Bill, à naviguer
entre trois univers : le connu, l'inconnu et le reconnu. Bill
voyage " entre " et non pas " dans " ces
trois univers, ce qui implique qu'il les découvre et
les côtoie sans jamais les atteindre réellement,
davantage qu'il ne les connaît, ou croit les connaître,
vraiment. Bill est toujours à la frontière de
trois espaces qui se correspondent et s'enchevêtrent.
Et tout cela, sous les yeux complices de sa femme, Alice,
et du spectateur.
LE CONNU
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Il représente,
tout d'abord, ce qui est célèbre, renommé.
Pour Bill, il s'agit du statut que lui confère sa profession
de médecin, qui par ailleurs contribue à son
identité et à son caractère. Du point
de vue scénaristique, il est très intéressant
que Bill soit médecin. Cela implique qu'il ait un rapport
au corps particulier et en même temps, cela lui ouvre
des portes et lui permet de poursuivre une quête qu'il
n'a paradoxalement jamais voulue entamer : celle de lui-même.
Celle qui répond à la question : qui est-il
vraiment ? En somme, il dispose de tous les moyens pour le
savoir et se dépêtrer de la situation dans laquelle
il s'est involontairement mis, ou plutôt dans laquelle
on l'a volontairement placé. Sauf qu'il ne sen rend
pas compte, errant dans un dédale de découvertes
et de possibilités les yeux grands fermés.
Le connu est également ce qui est su du plus grand
nombre, à l'image du visage et donc de l'identité
de Bill lors de la fête au château, au moment
où le maître de cérémonie l'oblige
à enlever son masque. Perdu au milieu d'inconnus, il
est le seul à ôter son masque dans une scène
particulièrement humiliante pour lui. Il est dénoncé.
Il n'est pas à sa place, tout le monde le sait, à
commencer par lui. Mais plutôt que de régler
cela discrètement, Kubrick préfère lui
renvoyer l'image humiliante d'un acte qu'il a été
poussé à choisir.
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Ici sont déjà
" prétendument " dressés deux pans
de la vie de Bill : celui qu'il croit inébranlable
et autour duquel gravitent, selon une mécanique bien
huilée, ses patients, sa femme, sa fille en un mot
sa vie. Et puis, il y a l'inconcevable, cette partie de lui-même
qu'il n’avait jamais cru bon ni possible d'explorer et qu'on
le condamne à démasquer. " Prétendument
", parce que le connu relève uniquement de la
reconstitution du spectateur. C’est lui qui, avec l'aide de
Kubrick, construit le " connu " de Bill, qui lui
sert alors de point de référence. Car Bill,
à la première seconde du film, ne connaît
plus rien. Tout ce qu'il a découvert et exploré
jusqu'alors, et qui définit son " connu ",
vole en éclat. Parce que celle que Bill croit avoir
découverte et connaître par cœur, c’est Alice,
avec qui il est marié depuis neuf ans et grâce
à qui il s'est forgé une identité. Pour
elle, peut-être plus que pour tout autre personnage,
il est d'abord un homme avant d'être un médecin.
Mais il semble avoir occulté ou du moins rejeté
une partie de ce que cela implique. Et finalement, la connaissance
de sa femme qui lui paraît tellement solide, ne semble
reposer que sur un a priori.
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