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INCONCEVABLE ET CERTAIN, GEORGES FRANJU
Par Bernard PAYEN



Georges Franju, cinéaste complexe, qualifié à tort de petit maître, singulier cinéaste du fantastique à la française flirtant avec l’âme surréaliste, membre de l’école du court métrage documentaire des années 50. Pour nous, Franju est l’un de ces cinéastes français qu’on a trop souvent sous-estimés, parfois regardé avec dédain, alors que son oeuvre est infiniment riche. Le réduire à sa passion pour l’insolite et l’inquiétante étrangeté est certes déjà beaucoup, mais profondément insuffisant. Ses films prennent la réalité à bras le corps pour la défigurer. Pour nous permettre de la regarder autrement. Rien de plus banal qu’un train qui passe, qu’une DS qui entre dans une cour, qu’un bal masqué ou qu’un abattoir, rien de plus banal sauf chez Franju, dont le regard singulier engendre, selon sa propre expression, une « explosion lyrique ». Celle qui choque et trouble les sens.

Nous avons voulu porter sur Franju un regard différent, en espérant créer l’envie de (re)voir ses films : une approche non exhaustive, attirée par la lumière, et subjuguée par tant d’apparitions et de disparitions, héritées de Feuillade ( l’un des maîtres de Franju), qui érigent l’incertitude en principe de réalité

L’IMPOSSIBLE RESURRECTION

Scène 1 - Dans un manoir, un vieil homme barbu vêtu de la tenue des chevaliers de Malte attend son heure. Intransigeant, il veut lui-même choisir son tombeau. C’est la raison pour laquelle, toussotant, il s’enferme dans une armoire, assis sur un trône doré. La porte se referme, il disparaît à nos yeux sans que l’on puisse dire exactement si sa volonté de mourir dans ce lieu s’est réalisée. Disparu, il l’est assurément. Mort ? Le doute subsiste, même si les héritiers de ce vieux bougon, et plus officiellement le notaire, le pensent désormais « indubitablement ».

Objectif Cinéma (c) D.R.

Scène 2 - Une mystérieuse femme au collier de perle jette un corps humain inanimé dans l’eau d’un canal par une nuit noire et inquiétante.  Le lendemain, une fois le corps découvert par la police, on apprend qu’il s’agit peut-être de la fille d’un grand nom de la chirurgie : le professeur Génessier. Celui-ci reconnaît d’ailleurs le corps. Or, nous apprenons bientôt que Christiane Génessier est en fait bien vivante mais le visage défiguré dissimulé derrière un masque. Son apparition ne résoud pas le mystère des disparitions de jeunes filles qui affolent la région. On apprend bientôt que Génessier père enlève ces clones de sa propre fille pour leur arracher la peau du visage et la transplanter sur celui de Christiane. Pour la faire ressusciter à ses yeux, comme aux yeux du monde.