Franju éveille notre imagination.
Le dialogue nous fait comprendre également la douleur ressentie
par Christiane devant l’impossibilité de se regarder dans un
miroir. Cette logique entretenue par le père de défendre à sa
fille de regarder son reflet est appliquée dans le film dans
son rapport au spectateur. Si Christiane enfreint cette règle
en tentant de s’observer dans le miroir des couverts et des
vitres des fenêtres ouvertes, Franju nous permettra aussi d’entrevoir
l’horreur.
Acte 2 - Christiane entre dans la
salle d’opération où est allongée sur un lit la jeune fille
enlevée par Louise. Elle se tourne vers le rare miroir présent
dans la salle, retire son masque, qu’elle pose sur un drap,
puis se dirige vers la jeune inconnue endormie. Elle effleure
son visage comme si elle cherchait à se l’approprier par le
toucher. La future victime ouvre les yeux. C’est alors le
seul moment du film, où par le biais d’un regard subjectif,
celui un peu hagard de la jeune inconnue réveillée, Franju
nous montre le visage horrifique de Christiane. La vision
est donc floue, ce qui atténue la peur ou le dégoût qui pourrait
s’emparer du spectateur devant cette chair à vif. Franju n’envisage
pas de montrer le visage de Christiane d’une manière gratuite,
ce plan est justifié par le regard de celle dont Génessier
va voler le visage. C’est la même vision que Christiane avait
de son propre visage lorsqu’elle tentait d’en regarder le
reflet.
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Acte 3 - Christiane semble
être guérie à l’issue de cette opération. Lors d’un dîner
à trois (Génessier, Louise et Christiane), la jeune fille
nous apparaît avec ce qui semble être « son vrai,
son beau visage », celui qu’elle avait avant l’accident,
comme nous le montre un peu avant le tableau qui la représente.
Christiane s’imagine être devenu « quelqu’un qui lui
ressemble mais qui revient de très loin ». Cette
perfection du visage, cet « angélisme » disparaît
pourtant très vite. L’opération a échoué. Franju dresse froidement
le constat de l’échec par des plans très curieux, proches
du documentaire scientifique où est expliquée en détail la
rapide dégradation du visage. Quelques plans fixes frontaux
interrompus avant que le visage ne retrouve définitivement
sa déchirure. Christiane est condamnée. Son visage disparaît
à jamais.
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