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  Vidéodrome (c) D.R.

Sur le plan formel, la réalisation étonne. David Cronenberg a choisi de rendre un monde virtuel sans avoir recours aux images de synthèse (contrairement à The lawnmowerman de Brett Leonard par exemple). Il se fie à la syntaxe cinématographique classique pour susciter l'étrangeté (travail sur l'éclairage, champs/contrechamps) et ainsi rend hommage à la puissance évocatrice du cinéma. Ce procédé lui permet également de créer un malaise diffus, en particulier lorsqu'il montre des gros plans de mains palpant des objets. Ces images plongent le spectateur dans un doute constant comme si les personnages eux-mêmes doutaient constamment de la réalité de leur environnement (rappelons que les images du casque de Videodrome apparaissaient pixelisées pour se fondre progressivement en classiques images de cinéma).

Malgré son allure de série B ludique, eXistenZ n'en offre pas moins une passionnante réflexion sur la notion de réalité. Au delà du jeu en lui même, le film aborde 2 manières qu'a eut l'homme de la modeler au cours de son histoire.

Tout d'abord, il est question, ici, de religion. Les séances de jeu ont lieu dans des églises et les opposants au virtuel, les réalistes, forment une secte. Cronenberg est un cinéaste athée mais il n'a jamais caché son intérêt pour la foi religieuse. Les sacrements, les rites sont un moyen d'adapter le réel à ses aspirations.

M. Butterfly (c) D.R.

De plus, la plupart des religions sont fondées sur cette ambivalence : elles évoquent une vie après la mort, une vie spirituelle tout en s'opposant formellement aux courants de pensée qui peuvent les remettre en question. Dans eXistenZ, la résistance réaliste fait barrage à la liberté créatrice qu'offre le virtuel car cela suppose d'accepter une conception de la réalité totalement différente de la leur.

Au contraire, développer une réalité différente peut se concevoir dans l'art. Cronenberg, dont les films sont souvent proches de la sublimation freudienne, représente le jeu vidéo (à l'instar du cinéma ou de la littérature) comme un moyen d'accéder à un autre monde. Alegra Geller, la conceptrice du jeu eXistenZ est montrée telle une artiste d'avant-garde qui propose de nouveaux moyens de perception à la fois mécaniques et organiques. Pour le réalisateur de Crash, l'expérience cinématographique revient à entrer dans un monde parallèle.

eXistenZ ne développe rien de moins que sa conception de la place de l'homme dans l'univers. Ironiquement cartésien (toutes les réalités existent), eXistenZ est finalement surtout un film existentialiste. Dans une interview accompagnant la sortie du film, Cronenberg paraphrase Heidegger : " Nous avançons à tâtons dans un monde dont nous ne connaissons pas les règles ou qui n'a même pas de règles et nous sommes à la merci de forces inconnues qui cherchent à nous détruire sans que nous sachions pourquoi. " Il pose donc, en dernière instance, une question aux "réalistes" : Qu'est-ce que le réel, tel que nous le connaissons, a de supérieur par rapport à un réel fantasmé ?

Sartre s'interrogeait sur la notion d'être à partir de l'expérience humaine, il disait que l¹homme est condamné à être libre. Cette idée sous-tend la réflexion de eXistenZ sur la réalité virtuelle. Une réflexion dénuée de jugement moral puisque, pour David Cronenberg, l'univers n'a pas d'autre sens que celui que nous lui donnons.

Même s'il est conscient des dérives possibles dans l'utilisation du virtuel par un pouvoir fasciste ou le capitalisme sauvage (voir la sinistre usine où sont fabriqués les gamepodes ou la guerre entre multinationales pour dominer le marché), Cronenberg ne délivre pourtant pas un message pessimiste. Comme le déclarait un autre cinéaste visionnaire, Francis Ford Coppola, la technologie est à l'homme ce que la toile est à l'araignée. En effet, le virtuel peut être synonyme de transmission du savoir et de développement des connaissances indépendamment de considérations matérialistes. L'héroïne de eXistenZ le dit : les gens sont programmés pour accepter si peu alors que les possibilités sont infinies.

Chacun est responsable de sa propre eXistenZ.



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2001
Spider avec Ralph Fiennes
1998 eXistenZ avec Jennifer Jason Leigh [Séances du film]
1996 Crash avec James Spader
1993 M. Butterfly avec Barbara Sukowa
1991 Naked Lunch / Le Festin nu avec Peter Weller
1988 Faux-Semblants / Dead Ringers avec Jeremy Irons
1986 La Mouche / The Fly avec Jeff Goldblum
1983 Dead Zone avec Christopher Walken
1982 Vidéodrome avec James Woods
1981 Scanners avec Stephen Lack
1979 Chromosome 3 / The Brood avec Oliver Reed
1979 Fast Company avec Nicholas Campbell
1976 Rage Rabid avec Marilyn Chambers
1974 Frissons / Parasite Murder avec Paul Hampton
1970 Crimes of the future avec Paul Mulholland
1969 Stereo avec Ronald Mlodzik
1969 Painkillers avec Nicolas Cage
1969 The Lie Chair