|
 |
|
|
Mary Reilly de Stephen Frears avec Julia Roberts
et John Malkovich offre une raison d'espérer. Ce que Frears
apporte au Dr Jekyll & Mr Hyde de Stevenson,
c'est un regard : le regard de la servante du docteur qui
synthétise à la fois celui du cinéaste et du spectateur.
Cette femme fragile au passé trouble attire autant Jekyll
que son double maléfique Mais Mary Reilly n'est pas qu'un
simple témoin, c'est un personnage qui regarde autant qu'il
est regardé, un moteur dramatique qui influence et fascine
les autres. La relation duelle et introspective du roman
devient un trio catalyseur de sexualité refoulée. Des différentes
adaptations de l'étrange cas du Dr Jekyll & Mr Hyde,
de Rouben Mamoulian à Jean Renoir, celle-ci se différencie
singulièrement : nous suivons Mary Reilly or elle ne voit
et ne comprend pas tout. Les éléments sur Jekyll et Hyde
sont donnés au compte-gouttes, certains restant totalement
obscurs pour qui n'a pas lu le roman.
Heureusement, Frears s'est bien gardé de ne réaliser qu'un
essai théorique. En soignant l'ambiance glauque ainsi que
les effets les plus crus, il a réussi un brillant film d'horreur
véritablement effrayant. Car son Dr Jekyll est un être souffreteux,
obsédé par le mal et la douleur, ses fantasmes morbides
trouvant leur aboutissement dans le personnage de Hyde.
Tous deux aiment Mary Reilly mais de façon assez perverse,
cette ancienne enfant battue aux nombreuses cicatrices et
au regard soumis les fascine. Elle-même n'est pas exempte
d'une bonne dose de masochisme. L'amour trouve pourtant
sa place dans cette relation des plus troubles, un amour
à la fois pur et obscène.
 |
|
|
|
Ainsi le film fait peur tout en prenant une dimension
tragique. Comme les plus grands films d'horreur, il s'agit
avant tout d'un drame humain ; ici porté par des interprètes
excellents : le caméléon John Malkovich trouve un rôle idéal
dans celui de Jekyll / Hyde, et Julia Roberts est bouleversante
dans un emploi pour le moins risqué. Précisons que la sublime
photo de Philippe Rousselot participe grandement à l'émotion
générée par le film.