Le succès de Dracula
lui ayant mis le vent en poupe, Coppola décide de produire
lui-même un nouveau Frankenstein dont il confie la
mise en scène à Kenneth Branagh. Du mythe prométhéen écrit
par Mary Shelley, le jeune cinéaste anglais ne sait visiblement
que faire. Il décide alors de s'en remettre à la loi du toujours
plus. Plus vite : le montage est ultra rapide, il multiplie
les mouvements de caméra grandiloquents ; plus fort : la pompeuse
musique de Patrick Doyle fonctionne en continu, les cascades
incongrues se succèdent.
Mais ces plus se transforment
rapidement en faiblesses car à force de prétention vaine,
Branagh fait apparaître de graves carences scénaristiques
et met en exergue des idées de mise en scène fort mal venues.
En effet, s'il dit mépriser le cinéma d'horreur, Branagh tombe
pourtant dans ses pires écueils avec une violence souvent
gratuite. Caricaturalement, le docteur Frankenstein ne conçoit
la médecine que sous l'angle de la couture
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Pourtant, rien de nouveau
par rapport à l'histoire originale. Sympto-matiquement, le
film s'intitule Mary Shelley's Frankenstein (comme
le film de Coppola avait pour titre Bram Stocker's Dracula).
Cela démontre implicitement qu'il ne souhaitait pas y introduire
d'éléments personnels malgré ses propos. En adaptant à la
ligne l'histoire de la romancière anglaise, le réalisateur
signifie lourdement ce qui y restait symbolique. L'exemple
le plus probant est cette idée ridicule de plonger sa créature
dans du liquide amniotique, comme si la métaphore de la naissance
n'était pas déjà évidente.
Ainsi, non seulement Branagh
réalise une adaptation sans intérêt mais il ridiculise même
le mythe qu'il illustre en filmant littéralement ses composantes
implicites.
C'est visiblement la même
démarche qui a animé Mike Nichols pour son film de loup-garou.
Dans Wolf, le réalisateur semble très fier de découvrir
que ce monstre représente la part bestiale de l'humain. Il
ne s'en tire pas mieux dans la réactualisation du mythe en
métaphore de l'arrivisme. Son film ne semble être qu'une illustration
de la comparaison entre loups et golden boys.
Cette pesanteur du discours
n'est pas sauvée par la forme. Comme Coppola et Branagh, Nichols
se désintéresse des éléments horrifiques de son scénario sans
pour autant les éliminer. Résultat : quelques effets grand-guignol
grotesques et un maquillage hideux nous cachent Jack Nicholson
dans son numéro pourtant savoureux de folie furieuse. La star
de Shining pouvait se passer de ses artifices de série
Z .
Ni regard novateur, ni émotion
trouble (parfois tout de même dans Dracula) sont les
caractéristiques de ces trois films indigents. Serait-il impossible
en cette décennie de remixage de retrouver la force des grands
contes populaires tout en les adaptant au goût du jour ?
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