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O brother, where art thou ? (c) D.R. O' BROTHER,
WHERE ART THOU ?

de Joel Coen
Propos de Jean DOUCHET
enregistrés au cinéma
Les montreurs d’images d’Agen
le 6 octobre 2000
Par Roland KERMAREC


A l’occasion de la 9e Semaine Départementale du Cinéma organisée dans le Lot-et-Garonne, une " Soirée Texas " était organisée au cinéma Les Montreurs d’Images à Agen, avec buffet de tacos et autres tortillas à l’entracte. Fallait-il noter l’émergence spontanée d’un comité de soutien à Georges Dabeuliou ? Nenni, aucun ballon rouge ou bleu n’obscurcissait la vue et pas le moindre panonceau " Votez pour le fils " ne se dressait avec enthousiasme parmi les participants. Pourtant, il serait effectivement question d’une campagne électorale américaine durant la soirée, mais d’un modèle loufoque et outrancièrement comique, quoique la réalité soit parfois aussi burlesque : après avoir élu il y a quelques années un piètre second couteau des westerns de série B, les Américains s’apprêtent à présent à voir un Président opérer le trajet inverse, puisque l’inénarrable Bill a accepté de jouer son propre rôle de patron de la Maison Blanche dans un James Bond. Bref, et même s’il serait également question de la chaise électrique durant la soirée, nul ne pensait un seul instant à Junior dans la salle, mais plutôt à deux autres vrais Texans, les Frères Coen, réalisateurs de " O’Brother, where art thou ? ". Les Montreurs d’Images avaient convié Jean Douchet, critique émérite aux Cahiers du Cinéma et historien du Septième Art, à venir commenter ces pérégrinations rocambolesques de trois pieds nickelés naïvement zozos et fraîchement gominés à travers une Amérique qui découvre le blues et les prémices d’un rock trépidant à l’époque de la Crise de 29.


SYNOPSIS : Dans le Mississippi profond, pendant la Grande Dépression. Trois prisonniers enchaînés s'évadent du bagne : Ulysses Everett McGill, le gentil et simple Delmar et l'éternel râleur Pete. Ils tentent l'aventure de leur vie pour retrouver leur liberté et leur maison. N'ayant rien à perdre et unis par leurs chaînes, ils entreprennent un voyage semé d’embûches et riche en personnages hauts en couleur. Mais ils devront redoubler d'inventivité pour échapper au mystérieux et rusé shérif Cooley, lancé à leur poursuite...


UN UNIVERS CINEMATOGRAPHIQUE DE LA REPRESENTATION

  O brother, where art thou ? (c) D.R.

O' Brother… se présente de façon ambitieuse comme une retranscription de L'Odyssée de Homère et, sur un mode beaucoup plus plaisant, comme une sorte de parodie de certains styles de cinémas américains hollywoodiens, à commencer par les road-movies. Il appartient à ce type de films qui mélangent plusieurs genres et qui sont, de ce point de vue, apparemment, "impurs", dans le sens où, justement, on peut les prendre de différents côtés.

C'est un film composite, on y trouve des références à beaucoup de choses, et d'abord à Homère, qui est d'ailleurs présenté dans le film sous l'aspect du noir aveugle sur sa draisine, puisque tout le monde sait de façon certaine qu'Homère était aveugle. On trouve beaucoup de citations à L'Odyssée ailleurs dans le film, c'est un film à citations, comme l'ensemble du cinéma américain depuis trente ans : c'est un cinéma qui n'est plus dans l'innocence et qui sait qu'il y a eu avant un autre cinéma, le grand cinéma classique. Depuis les alentours de 1970, tout le cinéma hollywoodien des grands cinéastes travaille sur ce qui s'est déjà fait avant, la référence est obligatoire. Par exemple, au début de ce film, le personnage d'Ulysse est habillé de telle façon que, si l'on connaît l'histoire du cinéma et les films des grands cinéastes américains, on est obligé de penser au film de John Ford, "Les Raisins de la Colère" : très volontairement, ils le font ressembler à Henry Fonda dans "Les Raisins de la Colère" puisque, c'est logique, le film se passe a priori à la même époque et le film de Ford était lui-même aussi un road-movie.